plantes R
LE RADIS
Rouge au-dehors, blanc à l’ intérieur : le radis annonce
clairement qu'il exerce deux actions opposées sur nos organismes
D'une part, il ouvre l'appétit, et il est parfaitement à sa place comme
hors-d'oeuvre. D'autre pàrt, il ne convient pas à tous les estomacs
car il est relativement indigeste
Il existe au moins deux espèces de cette plante cousine du chou, du
navet et de la moutarde (famille des crucifères) : l'une sauvage consi-
dérée comme une mauvàise herbe, est la ravenelle (encore dite rave-
Iuche, pied de glène, ravenet, gratteret, jotte russe, rosse, etc)' ; l’autre
cultivée, est le radis proprement dit, ou raviole dont on connaît de
multiples races rose, blanc, rond, long, etc); l'une de ces.races, le
radis noir, dont la racine comestible peut atteindre 50 cm de longueur,
est souvent baptisée à tort raifort ou raifort des Parisiens; en réalité,
ce n'est pas un raifort, mais bien un radis.
La ravenelle abonde dans tous les champs, au printemps, et recouvre
littéralement certains d’entre eux d’un tapis de petites fleurs à 4 pétales
jaune pâle ou blancs veinés de mauve ses feuilles découpées et
velues, conviennent mal au bétail, dont elles irritent les muqueuses
digestives : elles peuvent cependant être consommées cuites comme
légumes. ses graines, mûres en été, remplacent assez bien les graines
de moutarde dans la confection de sinapismes (notamment contre
les rhumatismes).
Le radis cultivé était déjà bien connu des anciens Égyptiens : les
pharaons donnaient du radis à croquer aux esclaves constructeurs
de pyramides' comme ils leur donnàient également de l’ail et de
l'oignon. Le radis rose est essentiellement apéritif, mais aussi anti-
scorbutique, stimulant, diurétique et capable de hâter l’élimination des
mucosités qui encombrent l’appareil respiratoire (expectorant). Le
radis noir, outre ces propriétei, est particurièrement recommandé
dans les cas de bronchites, de coquelucùes, de rhumatismes, de mala-
dies de I'appareil urinaire et de coliques hépatiques. J’ai connu une
vieille femme qui traitait les calculs biliaires et les carculs de la vessie
en recueillant le jus.d’un radis noir, qu’elle creusait assez profonde-
ment et qu'elle remprissait de miel - puis qu'elle laissait < transpirer >
au-dessus d'un vase.
RÉCOLTE :
Cueillez les feuilles de la ravenelle au printemps (pour
en faire des soupes, ce que je vous recommande égâlement avec les
feuilles du radis cultivés; ramassez ses graines en été. cultivez le
radis rose ou noir dans votre jardin : semez au printemps, en place,
et prévoyez un second semis pour le début de liété.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
SINAPISME
de graines de ravenelle : procédez comme avec les graines
de la moutarde noire.
INFUSION OU DECOCTION
de feuilles de radis (rose ou noir) : jetez deux poignées
de feuilles fraîches dans un litre d’eau. (2 tasses par jour ; comme sti-
mulant et diurétique.)
CATAPLASMES
d'écorce de radis noir : à appliquer sur diverses régions
du corps : pieds (congestion cérébrale), poitrine (toux, bronchite),
épaules, poignets ou genoux (rhumatismes), etc.
LE RAIFORT
Son nom vient de l'ancien français raïz, < racine >;
on y a ajouté I'adjectif < fort >, à la fois pour qualifler sa saveur
piquante et ses dimensions respectables. Car le raifort qui n'a rien
à voir avec le < raifort des Parisiens > (qui n'est autre que le radis
noir), à toutes les allures d'une plante < explosive > C'est la meilleure
et la pire des choses; à petites doses, il dynamise I'organisme et notam-
ment le système digestif; à doses massives il les dynamite!
C’est une grande plante de la famille des crucifères, parfois haute
de 1,50 m,-qui s'est rapidement échappée des jardins pour coloniser
tous les endroits frais , fossés , berges des rivières, bord des étangs)
ses feuilles ondulées, irrégulièrement dentées, atteignent parfois I m
de longueur, tandis que les fleurs, blanches, à 4 pétales, et très odo-
rantes, sont minuscules. L'espèce nous arrive probablement de Russie
bien que l’on l’ait affublée de quantité de noms fantaisistes (cranson de
Bretagne, cran des Anglais, radis de cheval, moutarde des Allemands,
moutarde des moines, moutarde des capucins, etc) Dès.le Moyen
Àge, sainte Hildegarde Ie recommandait contre la constipation, contre
les intoxications, les vers parasites, les maladies du foie, des reins,
dê la vessie, des oreilles, de la poitrine et de la peau.
En vérité, pour autant que mes longues années de pratique phyto-
thérapique me permettent de trancher, la racine du râifort me paraît
avoir à peu près les mêmes vertus que la moutarde. Elle est puissam-
ment révulsive (ce qui la fait indiquer contre tous les engorgements
sanguins, contre la toux, la coqueluche, la bronchite, la pleurésie,
la pneumonie, I'asthme, les congestions et les rhumatismes). Elle
est en outre diurétique (efficace contre l'albuminurie, les oedèmes,
la goutte, les calculs urinaires). Elle.exerce une action tonique sur
l'ensemble de l'organisme; elle est excitante, elle est antiscorbutique
et, à doses bien étudiées, c'est la meilleure amie de l'estomac, de
I'intestin et du foie. A l'extérieur, cette racine coupée ou râpée et
êtalée en cataplasmes, se comporte comme un rubétant parfait: en
d'autres termes, elle < tire le rouge > des régions atteintes, et en.les
décongestionnant, soulage la douleur et prépare la guérison; je la
conseille comme telle contre les vertiges et les syncopes (sur la poi-
trine), contre les lumbagos, les sciatiques, les dourlurs de la colonne
vertébrale, les maux d'estomac ou de ventre, les migraines et les rages
de dents.
RÉCOLTE :
Si vous n'avez pas de raifort au jardin, cherchez-en
quelques pieds dans les endroits humides proches de chez vous et
déterrez-en la racine en automne. En culture, le raifort se multiplie
végétativement, par éclats de la racine; il aime les sols bien arrosés,
riches et profonds; il convient, à la fin du printemps, de couper ses
racines latérales, afin d'obtenir en octobre une très grosse racine
principale.
PREPARATION ET EMPLOI :
INFUSION OU DECOCTION :
comptez une demï poignée de racine fraîche coupéè
en petits morceaux (non pelée) par litre d’eau (2 tasses par jour.)
JUS
de raifort (antiscorbutique) : exprimez le suc de Ia
racine fraîche à travers un linge. (1 ou 2 cuillerées à soupe par jour.)
CATAPLASMES
de rafort frais : appliquez sur la région du corps concer-
née, des tranches de racine aussi fnes que possible, ou mettez-y un
emplâtre de racine râpée (peau comprise ) .
LA REINE.DES.PRES
Qu'elle est jolie , ma reine...des sources et des ruisseaux
enchanteurs, quand elle peuple en gros massifs nuageux les coins
d’ombre humides. Ses petites fleurettes immaculées, groupées en
panaches épais, exhalent un parfum suave. L'espèce est cousine de
la rose, quoiqu’elle n'en ait pas tellement I'air : mais les liens de
parenté ne peuvent-ils pas être dans I'ordre des odeurs?
Il s'agit d'une herbe élégante, aux tiges un peu rouges, haute de plus
d'un mètre et toute garnie de grandes feuilles découpées comme une
dentelle végétale. Elle fleurit en plein été. On l'appelle encore fili-
pendule ulmaire, spirée ulmaire, ulmaire, barbe de chèvre, pied de
Loup, nignette, ormière, fleur des abeilles ou belle des prés. Elle n'a
guere eté utilisée en phytothérapie avant le XVIe siècle, mais alors
quel succès! On l'a recommandée contre la rougeple, la variole, la
dysenterie, les flèvres malignes, la diarrhée, les crachements de sang
et les hémorroides. Et on a ajouté plus récemment à la liste de ses
indications la goutte, les douleurs d'estomac, les blessures, les vapeurs,
les migraines et les malaises du retour d'âge chez les femmes.
La reine-des-prés, à mon avis, est d'abord diurétique : on peut y avoir
recours, avec d’excellentes chances de guérison ou d'amélioration
dans tous les cas d'oedèmes, de rhumatismes, de goutte, de coliques
néphrétiques et de calculs urinaires. Elle active l'élimination de l'eau
et des toxines dans I'obésité et la cellulite (d'autant plus qu'elle est
également propre à provoquer la sueur) Elle se montre tonique et
calmante, ce qui, ajoute à son action sudorifique, en fait un excellent
médicament contre les maladies infectieuses, et notamment la grippe,
la rougeole et la scarlatine. Elle est encore vulnéraire, c'est-à-dire
qu'elle hâte la cicatrisation et la guérison des plaies, des ulcères et
des coupures. Je I'ai utilisée contre les saignements, les hémorragies,
les craclements de sang, les encombrements des voies respiratoires,
les diarrhées, etc. : cela suffit à prouver qu'elle a largement sa place
dans ce qu'on a appelé < la pharmacie du Bon Dieu > - parmi les
plantes médicinales. D'autant plus, et j'en terminerai ainsi avec cette
reine des lieux humides, qu'elle exefce une précieuse action tonique
sur le coeur...
RÉCOLTE :
Cueillez la reine-des-prés au début de la floraison, en
juin-juillet, dans les prairies inondées, au bord des sources, près des
rivières, etc. Les racines sont actives, de même que les feuilles (plus
faiblement), mais les fleurs ont un parfum si suave que ce sont elles
que je vous conseille de récolter en premier. coupez les grandes
queues fleuries de la plante à mi-hauteur, et faites les sécher dans
votre grenier, accrochées au plafond la tête en bas. vous pouvez
évidemment, si vous le désirez, planter la reine-des-prés au jardin ;
elle se multiplie fort bien par éclats de souche, et n;exige que deux
choses : beaucoup d'eau et un peu d'ombre.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION RAPIDE :
jetez un litre d'eau bouillante sur une poignée de fleurs
fraîches ou sèches. (3 à 4 tasses par jour.)
INFUSION LENTE,
beaucoup plus efficace : jetez un litre d'eau à 80 o C sur
une poignée de fleurs fraîches ou sèches, et laissez reposer l2 heures.
(3 à 4 tasses par jour.)
VIN
de reine-des-prés : jetez 4 poignées de fleurs fraîches
ou sèches dans un litre de vin rouge, et laissez macérer 6 à 10 heures
(un petit verre aux repas)
DÉCOCTION
pour l'usage externe (compresses, Iotions, pansements,
douches vaginales) : jetez 2 poignées de fleurs dans un litre d'eau.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
mêmes proportions que pour la recette précédente.
LE ROMARIN
On I'appelle encore rose marine, herbe aux couronnes
ou encensier, et ces noms admirables conviennent au plus joli et au
plus angélique des arbrisseaux... Le prince des aromates, comme
on I'a parfois encore baptisé, tenait la plus grande place dans les
cérémonies antiques : on en tressait des couronnes aux jeunes épou-
sées, et il représentait à la fois le symbole du mariage, de I'amour
et de la mort... Les pharaons de la vieille Égypte en faisaient mettre
un rameau dans leur tombe, pour parfumer leur voyage au pays des
âmes. Au xrve siècle, une reine en tomba littéralement amoureuse :
la vieille Elizabeth de Hongrie, alors âgée de 72 ans, goutteuse et
toute suppliciée de rhumatismes, retrouva grâce à lui sa jeunesse,
au point que le roi de Pologne la demanda sur I'heure en mariage!
Depuis lors, on se mit à vanter partout les vertus de 1' < eau de la reine
de Hongrie >, et Mme de Sévigné, autre rhumatisante célèbre, put
écrire qu'elle en était folle, et que c'était < le soulagement de tous les
chagrins >...
J'aime à la folie le parfum du romarin dans la garrigue. J'aime à
rencontrer, au détour du chemin, dans un éclaboussement de lumière,
cet arbrisseau que je sais nourri du grand soleil ami de la Méditer-
ranée... Et c'est toujours avec une émotion rare que je me penche
pour détailler l'élégance de ses petites feuilles, vertes à la face supé-
rieure, et tout argentées de poils à la face inférieure; ses fleurs bleu
pâle, parfois presque blanches, avec leurs deux lèvres inégales, me
paraissent chanter toute la joie du monde; mais peut-être ne font-
elles qu'appeler les abeilles au festin de leur nectar digne des dieux?
Le miel de Narbonne est tout imprégné de l'odeur du romarin,
et c'est celui que je préfère...
Je ne saurais trop vous recommander de réserver une place d'honneur
au romarin dans votre cuisine - dans vos sauces, vos coulis aux herbes
du Midi, ou pour saupoudrer vos côtelettes... Mais je vous conseille,
avec plus d'énergie encore, d'en conserver toujours de grands bou-
quets pour votre pharmacie naturelle. Le romarin est d'abord un
inégalable stimulant : j'ai requinqué en quelques jours, avec force
infusions et bains de cette plante, des dizaines d'anémiques, de conva-
lescents, de vieillards, de surmenés, de neurasthéniques et de dépres-
sifs... Mais l'herbe-miracle qui redonna la jeunesse à une reine, possède
plus d'une vertu. Elle est diurétique (ce qui explique ses propriétés
la nervosité, I'angoisse, l'insomnie èt res migraines d’origine nerveuse.
Elle. est encore digestive et cholagogue (c'est-à-dire qu’elle stimule
la sécrétion de la bile er qu'elle soutient le travail du foie). Elle est
vermifuge. Elle est amie des femmes, car elle combat les affections
de la peau (elle entre dans la préparation de l'eau de cologne et de
nombreux baumes), régularise les règles et guérit les pertes blanches.
A l'extérieur, je la conseille de mille manières, sur res oedèmes, les
Coups, les contusions, les entorses, les foulures; elle hâte la cicatrisa-
tion des plaies; elle soigne les affections de la bouche (gargarismes),
les diarrhées (lavements) et les maladies des organes génitaux des
femmes (douches vaginales)...
RECOLTE :
Le romarin fleurit pratiquement toute l’année dans
les garrigues méditerranéennes : cueillez-en des rameaux entiers,
que vous ferez sécher à l’ombre, en petits bouquets suspendus. Au
jardin, même sous des latitudes relativement septentrionales, vous
pouvez le faire venir assez facilement, à condition de choisir la meil-
leure exposition au soleil, ainsi qu'une terre légère et peu humide;
il ne fleurira, de la.sorte, qu’en juin-juillet, epoque à laquelle vous
procéderez à la récolte. Si vous voulez acheter du bon romârin, adres-
sez-vous à une herboristerie sûre, car à l'heure actuelle des aigrefins
le cultivent industriellement, avec engrais chimiques et pesticides.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION ET DECOCTION
jetez une demi-poignée de romarin dans un litre d’eau
(comme antispasmodique), ou une bonne poignée (comme stimulant).
Prenez-en I à 3 tasses par jour, selon l’effet recherché (calmant ou
excitant ).
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
comptez une bonne poignée de rameaux fleuris par litre
d'eau. (Contre les rhumatismes, notamment.)
INFUSION CONCENTREE
pour l'usage externe (gargarismes, lavements. Douches
vaginales, frictions contre les entorses, etc. ) : jetez une poignée ef demie
de rameaux fleuris par litre d'eau.
VIN
de romarin : faites macérer une poignée de plante dans
un litre de vin rouge (48 heures) ou blanc (24 heures). Un petit verre
à chaque repas, comme diurétique.
TEINTURE
de romarin : faites macérer une poignée de plante dans
1/4 de litre d'eau-de-vie. (Une cuillerée à café par jour')
EAU DE LA REINE DE HONGRIE :
préparez une teinture de romarin et, selon Ia même
méthode, une teinture de lavande ; mélangez 3 volumes de la première
à un volume de la seconde. Usage interne : une cuillerée à cafe par
jour - uniquement pour les adultes. Usage externe : en frictions, mas-
sages, etc,, contre les rhumatismes, la goutte, les douleurs diffuses.
POMMADE
contre la douleur : faites fondre à feu très doux deux
cuillerées à soupe d'huile d'olive, deux cuillerées à soupe de résine
de sapin, et deux cuillerées à soupe de cire d'abeilles; ajoutez-y une
cuillerée à café de teinture de romarin.
INFUSION COMPOSÉE
contre les crises d'asthme : jetez 1 pincée de romarin,
1 pincée de fleur d'oranger, 1 pincée de thym et 1 pincée de serpolet
dàns un bol d'eau bouillante. (A prendre le matin')
LARONCE
Tout, en elle, paraît conçu pour griffer : ses tiges, ses
feuilles, le pédoncule même de ses fleurs, sont armés d'aiguillons;
elle envoie de véritables tentacules hérissés de pointes dans toutes
les directions, comme pour ne laisser aucune chance à ses proies :
malheur au gamin rêveur qui expose ses mollets nus à la caresse de
cette furie végétale ! Mais aussi la ronce protège : elle offre un abri
sûr aux petits oiseaux et aux lapins que les carnassiers traquent;
et elle est pour ainsi dire l' < envoyée > de la forêt dans les terrains
que nous ne cultivons plus : sous ses rameaux épineux, les petits
arbres poussent sans crainte des herbivores; quand ils se sont déve-
loppés, elle leur laisse la place, et s'en va conquérir de nouveaux
espaces, active à se reproduire à coups de marcottages naturels (une
tige se recourbe, prend racine, et donne naissance à un nouveau
pied)...
La ronce, ou aronce, ou éronce, ou mûrier de renard, ou catimuron,
ou mûrier sauvage, ou encore mûrier des haies, épanouit en été ses
fleurs blanches, et offre d'août à octobre ses fruits composés carac-
téristiques, d'abord rouges puis noirs violacés, que l'on appelle
mûres parce qu'ils ressemblent à ceux du mûrier vrai, mais qu'il
vaudrait bien mieux appeler mûrons pour éviter toute confusion.
En effet, ce n'est pas sur la ronce que I'on élève le ver à soie, mais
sur une plante venue d'Orient, et qui appartient à la famille des mora-
cées. La ronce, elle, se classe dans la famille des rosacées, comme la
rose, le fraisier, le framboisier et le pommier.
Mangez des < mûres > à volonté, au sucre, en confitures ou en sirops :
c'est un aliment aussi délicieux que sain. Celles qui sont bien noires
combattent la constipation, aident la digestion, combattent les inflam-
mations de la bouche et de la gorge, et aident à la guérison des angines
et des amygdalites. Ces mêmes fruits cueillis avant la maturité (verts
ou rouges) se montrent souverains contre les diarrhées, et notamment
les diarrhées des nouveau-nés, auxquels je recommande de donner
un sirop moitié mûres vertes, moitié mûres noires'
Les autres parties de la plante ne sont pas moins actives (feuilles,
jeunes pousses, fleurs et racines). Le médecin grec Dioscoride les
conseillait déjà pour resserrer les organes trop distendus (intestin,
utérus), pour consolider les gencives, pour soigner les ulcères et les
vilaines plaies, pour calmer la douleur occasionnée par les hémorroÏdes,
et pour atténuer le désagrément des aigreurs d'estomac. Au Moyen
Agè, sainte Hildegarde ajoutait à cette liste d'indications la toux,
les maux de gorge, les fièvres, les migraines et les rages de dents. Je
conseille quant à moi I'usage de la ronce plus particulièrement contre
les diarrhées chroniques, les saignements et les hémorragies de toutes
sortes, les plaies, la grippe, les maux de gorge, les angines et l'enroue-
ment. En gargarismes, elle fait merveille contre les infections et les
irritations des gencives. Elle est également efficace contre les maladies
de la peau (dartres, acné, eczémas), les abcès, les furoncles, et je l'ai
utiliséè avec succès pour soigner des hémorroides et des pertes blanches.
Elle constitue enûn un bon traitement d'appoint contre la blennorra-
gie.
RÉCOLTE :
Vous n'aurez aucune peine à trouver des ronces à
deux pas des chemins de campagne... ou même en plein milieu, lors-
qu'ils ne sont pas bien entretenus. Cueillez les jeunes pousses et
les feuilles au printemps, les fleurs juste avant l'épanouissement,
et faites-les sécher à l'ombre. Arrachez les racines en été. Cueillez
les mûres, selon vos besoins, soit lorsqu'elles sont encore vertes,
soit lorsqu'elles ont pris la jolie couleur sombre qui est la leur après
s'être gorgées de soleil.
PREPARATION ET EMPLOI :
INFUSION
de feuilles, de jeunes pousses, de fleurs ou de racines :
jetez une petite poignée de chacun de ces éléments, ou de mélange,
dans un litre d'eau. (3 tasses par jour.)
DECOCTION
de feuilles, de jeunes pousses, de fleurs ou de racines
(pour l'usage externe : gargarismes, lavements, douches vaginales,
applications locales) : comptez deux poignées de chacun de ces élé-
ments, ou de mélange, par litre d'eau.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
jetez deux poignées de fleurs et de feuilles par litre d'eau.
JUS
de mûres : à volonté, notamment contre les diarrhées.
THÉ
de ronces : c'est une boisson pleine de vertus, et de plus,
délicieuse, car elle développe un arôme de rose. Étalez pendant deux
jours, à I'ombre, un mélange de 2/3 de feuilles de ronce et de 1/3 de
feuilles de framboisier. Hachez-les, et laissez-les fermenter pendant
deux autres jours dans un torchon bien propre. conservez votre thé
dans des boîtes de fer blanc : procédez, pour le préparer, exactement
de Ia même façon que pour un thé ordinaire.
LAROSE
La rose est à elle seule un monde : elle a la perfection de
la sphère, et elle me paraît un concentré de tous les mystères des pro-
ductions végétales. c'est l'inçarnat aux lèvres des jeunes filles, le point
sur le < i > du verbe < aimer >, la lumière des haies vives, et le labora-
toire secret du plus exquis des parfums... Je n'entreprendrai pas de la
présenter : les mots manquent pour décrire tant de splendeurs réunies.
comment, sans tomber dans le cliché, rendre compte du velours iné-
galable de ses pétales, de I'impeccable géométrie de son feuillage d'éme-
raude, ou de I'or fondu de ses étamines douillettement assises au creux
humide de sa corolle? Je me souviens fort bien qu'un jour de mon
enfance, je l'ai couronnée < la reine des fleurs >; c'était une cérémonie
entre elle et moi, au fond du jardin, avec pour seule musique la chan-
son fraîche des oiseaux;j'ignorais alors que je ne faisais que reprendre,
à l'égard de ma ravissante amie végétale, le qualitcatif dont usait la
plus passionnée des poétesses grecques, la divine Sappho, vingt-sept
siècles avant moi...
Mais la rose n'est pas un monde pour les seuls poètes : elle I'est encore
pour les botanistes, les chimistes, les phytothérapeutes et tous ceux qui
entendent lui emprunter ses étonnants pouvoirs. On ne compte pas
moins de soixante-dix espèces de roses sauvages (églantiers), dont une
quarantaine propres à I'Europe. Quant aux variétés cultivées, c'est
par milliers qu'on les dénombre. On a pu dire que, chaque soir, les
horticulteurs en faisaient naître une nouvelle : et c'est, sur la palette
des jardiniers magiciens, une extraordinaire symphonie de pourpres
noirs, de rouges, de roses impalpables, de jaunes et d'orangés écla-
tants, avec des violets plus lumineux que l'améthyste, des rubis et des
saphirs tels qu'on n'en a jamais vu sur la couronne des empereurs...
Tant de diversité se paie. Les unes y laissent leur parfum. Les autres
ont la beauté presque irréelle des moribondes. (< Et rose, elle a vécu
ce que vivent les roses, L'espace d'un matin >.) Certaines enfin, trop
malmenées par des hybridations en cascade, trop aspergées de pesti-
cides et trop engraissées à coups de < bonifiants > chimiques, perdent
à jamais leurs précieuses qualités médicinales.
Je n'ai ni la prétention, ni le désir, d'entraîner le lecteur dans le dédale
des espèces et des sous-espèces de roses. J'ai appris, sur la terre des
Mességué, sur cette glèbe du Gers où les fleurs viennent plus nettes,
plus odorantes, plus fortes que partout ailleurs, que la simplicité vaut
à elle seule les autres qualités réunies. Je me contenterai donc, parce
que son utilisation thérapeutique est essentielle, de parler ici de la rose
rouge.
On la baptise encore rose de France, rose de Provins, rose de Champa-
gne ou cocquart. Pour moi, c'est en toute simplicité la plus belle, la
reine des reines. Les poètes I'ont chantée, tous les livres sacrés la révè-
rent, et son parfum était exclusivement réservé aux rois. On en a trouvé
plusieurs bouquets intacts dans le sarcophage du pharaon Toutankha-
mon : l'épouse du prince-enfant les avait déposés là, il y a plus de trente
siècles, pour ultime témoignage d'amour...
L'espèce, à l'état naturel, fréquente les terrains calcaires du bassin
de la Méditerranée : c'est 1à qu'elle élabore à la perfection les princi-
pes actifs de ses larges fleurs rouge vif, que sertissent des bouquets de
feuilles sombres, épaisses et luisantes, à trois ou cinq folioles dentées.
Les croisés - Thibaud de Champagne ou Robert de Brie - I'ont
rapportée d'Orient, et introduite dans le nord de la France; par la
suite, les jardiniers en ont tiré trois des plus belles races horticoles qui
existent : la rose à cent feuilles, la rose blanche et la rose de tous les
mois. Les médecins grecs la connaissaient déjà parfaitement et la
recommandaient comme tonique. Les belles Romaines, après le bain,
se frottaient de poudre de rose, faisaient briller leurs paupières avec
l'huile essentielle de la fleur, et, pour garder I'haleine fraîche, cro-
quaient des pastilles de pétales de rose, de myrrhe et de miel. Les méde-
cins arabes n'avaient que louanges à l'égard de la plante : Avicenne
affirmait avoir guéri certains crachements de sang par le seul emploi
de la confiture de roses (azuccar ot zuccar). Les apothicaires du Moyen
Age en donnaient par livres entières aux malheureux phtisiques. La
femme d'un vice-roi du Portugal fut sauvée en sept mois de la tuber-
culose grâce à de véritables orgies de conserves de roses (on dit même
qu'elle y gagna une beauté nouvelle). Et le fait m'a été rapporté naguère
(par le plus authentique des docteurs en médecine) d'une jeune poitri-
naire fort mal en point, qui se gava littéralement de pétales de rose et
de miel pendant un an, et qui se porta dès lors comme un charme...
ll m'a été donné mille fois d'observer les admirables effets de la reine
des fleurs. L'infusion légère de ses pétales, bue à temps, est souveraine
contre les maux de gorge, les écoulements du nez et des bronches, les
inflammations rebelles du système digestif, les diarrhées et la dysen-
terie. Ceux dont la flore intestinale a été ravagée par des doses immo-
dérées d'antibiotiques ont tout intérêt à en entamer une cure vigou-
reuse. Les femmes qui souffrent de pertes blanches et de pertes de sang
anormales s'en trouvent ordinairement soulagées (les douches vagina-
les, en I'occurrence, font merveille). L'infusion concentrée et le sirop
de roses constituent d'excellents fortifiants pulmonaires, doublés de
bons toniques généraux : je les recommande tout particulièrement
aux citadins que leurs poumons inquiètent, ainsi qu'aux convalescents
et aux personnes du troisième âge. Les enfants délicats y puiseront à
coup sûr de quoi passer certains caps difficiles de la croissance. Le
miel rosat et la confiture de roses s'utilisent de façon analogue, mais
leur action est plus vive, plus directe - je n'irai pas jusqu'à dire plus
brutale, car avec mon amie tout est douceur; primum non nocere,
< d'abord ne pas nuire >...
La rose est plus admirable encore dans tous ses usages externes. J'ai
toujours prôné les traitements par osmose : mon père m'en a transmis
les secrets, quoiqu'il n'ait probablement jamais connu le terme bar-
bare par lequel les physiologistes désignent aujourd'hui le phénomène.
Mais ces traitements, jamais je n'ai eu plus de joies à les entreprendre
qu'avec ma plante-reine. Un riche industriel avait pris I'habitude de
jeter dans I'eau de son bain quelques poignées de pétales de roses
(comme on en jonchait autrefois le lit des jeunes mariées) : il s'aper-
çut que ses rhumatismes disparaissaient. cette découverte, mes ancê-
tres de Gavarret aussi I'avaient faite, et plus d'un arthritique leur doit,
par mon entremise, de pouvoir trotter encore comme à vingt ans...
Mais la rose a mille pouvoirs. L'infusion de ses pétales (dans de l’eau
ou du vin), le vinaigre rosat et la décoction de ses fleurs, utilisées comme
lotions, font merveille pour la santé du foie, des intestins et des nerfs.
La rose et la beauté féminine ont toujours été associées : en témoignent
des poèmes, dans toutes les langues de I'Orient et de l'Occident. Mes-
dames, pourquoi ne pas suivre l'exemple des belles Romaines? Rien
n'est plus efficace, pour les soins quotidiens de la peau, le nettoiement
du visage, la prévention et la suppression des rides, que I'eau de rose.
Rien n'est plus actif contre la séborrhée, l'acné, les < points noirs >.
Pourquoi s'en remettre à la chimie, qui brûle l'épiderme, quand une
fleur a plus d'effets? Mais ce n'est pas tout : I'eau de rose est souve-
raine contre les petites plaies, les contusions, les entorses, les foulures.
Et rien - sinon peut-être le bleuet - ne forme un meilleur collyre pour
les yeux malades d'où suintent des humeurs. Je ne cite que pour
mémoire les gargarismes (contre les inflammations de la bouche et de
I'arrière-bouche), les cataplasmes et les sachets de roses (contre les
ædèmes), les roses cuites au vin (contre les ulcères), enfin I'onguent
rosat ou pommade rosat (pour la beauté du teint, particulièrement
en été, lorsque le soleil craquelle la ptiau, et contre les gerçures en hi-
ver)...
RECOLTE :
Avant de livrer quelques-unes de mes recettes, je voudrais
dire un mot de la façon dont il convient de traiter la plante. On peut
certes, si I'on habite le Midi des cigales et des coteaux calcaires inon-
dés de lumière, la récolttr en pleine nature - là oir la nature a pu résis-
ter aux poisons que I'humanité s'ingénie à produire. Mais d'ordinaire,
la rose de Provins se cultive. Elle se plaît en haies ou appuyée contre
la maison, et fait bonne tgure dans les massifs. Plantez-la dans un
terrain allégé, après avoir rafraîchi les racines au sécateur et taillé à
un ou deux yeux. Les pétales doivent être cueillis en boutons, par temps
sec. On laisse tomber les étamines, on coupe l'onglet (la partie infé-
rieure jaunâtre de la lame colorée), on fait sécher rapidement à
l'ombre : si la préparation est bonne, elle conserve la teinte la plus vive,
et son odeur semble devenir plus pure chaque jour. Il convient de gar-
der I'ensemble dans une boîte de fer blanc ou un bocal de verre teinté
hermétiquement clos, et de ne pas oublier que les végétaux perdent
en trois ou quatre mois la bonne moitié de leurs propriétés curatives.
PREPARATION ET EMPLOI :
INFUSION :
légère: jetez une demi-poignée de pétales secs dans un
litre d'eau bouillante. (Une tasse avant chaque repas.) Mêmes propor-
tions pour la décoction et l’infusion au vin.
concentrée : .jetez une poignée de pétales secs dans un litre
d'eau bouillante. (2 tasses par iour.)
SIROP :
mettez deux poignées de pétales secs dans un récipient;
arrosez avec un demilitre d'eau bouillante ; faites infuser au coin du
feu pendant 24 h; passez dans un linge et faites cuire doucement ovec
une livre de sucre. (2 à 4 cuillerées à soupe par iour.)
MIEL ROSAT OU RHODOMEL :
mettez dix poignées de pétales secs dans un récipient ;
arrosez avec 2 litres d'eau bouillante ; laissez infuser au coin du feu pen-
dqnt 12 h; passez dans un linge ; mêlez le liquide recueilli à 1,5 kg de
miel blanc ; faites cuire à feu doux ; ôtez l'écume et filtrez. (En garga-
rismes, en lavements, etc. )
VINAIGRE ROSAT :
mettez dix poignées de pétales secs à macérer dans 4 litres
du meilleur vinaigre rouge; exposez le récipient pendant 15 à 20 jours
au soleil (ou pendant un mois à température douce) ; filtrez. (usage
interne et externe : en lotions, gargarismes, collyres) '
CONSERVE DE ROSES :
broyez les pétales secs dans un mortier avec le triple de
leur poids de sucre, et yersez-y de l'eau de rose de façon à obtenir une
pâte onctueuse, ayant la consistance du miel; ajoutez 2 ou 3 cuillerées
de glycérine officinale. (2 à 5 cuillerées à soupe par jour)
CONFITURE DE ROSES :
faites cuire les pétales frais pendant 2 à 3 heures à feu
doux dans une égale quantité de sucre, avec un peu d'eau pure ; en fin
de cuisson, aioutez au mélange le ius d'un citron.
ONGUENT ROSAT OU POMMADE ROSAT :
prenez une demi-livre de saindoux et une demi-livre de
roses fraîches ; mélangez et laissez macérer 6 à 7 jours ; cuisez à feu
doux; exprimez à travers un linge, de façon à obtenir le produit le plus
pur. (En applications externes.)
ROSES CUITES AU VIN :
laissez infuser pendant 1/2 heure une partie de pétales
secs pour 16 parties de vin rouge bouillant. (En applications externes,
contre les ulcères.)
EAU DE ROSE :
recueillez les corolles des roses les plus odorantes ; faites-
les sécher à peine ; disposez-les en couche épaisse sur un linge fin tendu
au-dessus de l'orifice d'un vase; couvrez de quelques feuilles de papier
fort ; mettez sur le papier un por de rcrre rempli de braises incandescen-
tes ; sous I'influence de la chaleur, la précieuse eau de rose filtrera goutte
à goutte dans le récipient inférieur. (Pour tous les soins de beauté :
rides, yeux gonflés, peau malade, etc. Comme démaquillant.)
LE SAPIN ET LE PIN
Mon beau sapin, roi des forêts, que j'aime ta ver-
dure... Oh! qu'elle me ravit, cette chanson :elle a la couleur des
Noëls de mon enfance, avec de la jolie neige blanche pour décor, une
messe de minuit, des clochettes et des cadeaux... Il n'y avait pas certes
beaucoup de cadeaux à la maison, car nous ne roulions pas sur l'or :
mais que voulez-vous, ils étaient offerts avec le coeur ! Y songez-vous,
de temps à autre, à vos Noëls? Vous rappelez-vous vos bonheurs sim-
ples d'enfants qu'une panoplie d'Indien ou qu'une poupée comblait?
Êtes-vous encore capable d'en faire resurgir toute la joie? Si oui, alors
vous n'avez pas perdu vos racines, vous ressentez encore la magie
du village, et je sais que vous communierez un jour aussi intimement
que je I'ai fait avec la nature et les plantes.
Pour moi, le sapin est un peu le symbole de cette union éternelle des
hommes et des végétaux. A la folie du monde actuel, il oppose sa
sagesse (ne dirait-on pas quelque philosophe barbu et bon?), sa force
tranquille, son calme et sa générosité. Car il nous chauffe et nous pro-
tège. Car il nous offre I'ombrage de sa ramure épaisse en été, et I'abri
de ses branches lorsque vient la saison froide. A cela, j'ajoute qu'il
nous guérit. La résine , les jeunes pousses, la poix, I'essence qu'on en
tire (ou qu'on vole à son cousin le pin), possèdent mille vertus médi-
cinales. Élles ont été employées, pour certaines, depuis la plus haute
Antiquité. Toutes comptent aujourd'hui parmi les armes favorites
des phytothérapeutes.
Nos forêts, livrées à la furie des marchands de bois, ne sont plus ce
qu'elles étaient. En quelques décennies, elles se sont rétrécies comme
des peaux de chagrin : cependant, oû y trouve encore en abondance
de ces grands conifères, rois de la Terre à l'ère secondaire, et dont le
sapin et le pin restent les plus majestueux représentants. La liste com-
plète de toutes les espèces et sous-espèces de ces arbres serait fasti-
dieuse à dresser : sapin pectiné (ou sapin blanc, ou sapin argenté, ou
sapin noir, ou sapin des Vosges), épicéa, mélèze, pin parasol, pin mari-
time, pin sylvestre, pin laricio, pin noir, pin de montagne, câ ne sont
là que quelques représentants de ce vaste groupe végétal. En fait, si
tous sont utiles, le sapin pectiné et le pin sylvestre ont le plus de vertus.
Quant à moi, j'emploie essentiellement la résine de ces arbres, les
bourgeons du pin sylvestre, et l'essence de térébenthine. un célèbre
phytothérapeute disait que la résine était le sang des conifères, et
qu'elle pouvait, d'une certaine manière, devenir notre propre sang. Il
avait parfaitement raison. Non seulement les < perles précieuses > qui
coulent des blessures du sapin et du pin excitent toutes les sécrétions
et activent les glandes endocrines (les < maîtresses de notre orga-
nisme >), mais encore elles agissent favorablement sur 1a plupart des
organes. Zimmermann, médecin allemand du siècle dernier, recomman-
dait la cure exclusive de résine contre la tuberculose : il exagérait à
coup sûr, mais pas autant qu'on pourrait le croire. En réalité, la résine
donne les meilleurs résultats contre les bronchites (chroniques ou
aiguës), les pneumonies et les pleurésies. Notre époque, dira-t-on,
dispose d'antibiotiques pour soigner de telles affections; mais rien
n'interdit de recourir aux vieilles méthodes pour aider les neuves, et
pour limiter leurs inconvénients... or la résine est encore efficace contre
une infinité de troubles. vous l'emploierez avec succès contre les mau-
vais fonctionnements du système urinaire, les cystites, les calculs de la
vessie, les pertes blanches et la blennorragie. En outre, elle fait mer-
veille contre les coliques hépatiques. Mon père en usait plus parti-
culièrement pour calmer les douleurs des rhumatismes et de la sciati-
que. Boulettes, pommades, pilules à la résine, sont actives contre les
vers parasites. Recourez encore à cette substance contre les hémorra-
gies et les aflux anormaux de sang (notamment pendant les règles,
chez les femmes). Enfin la résine est un antidote du phosphore, et peut
rendre de grands services en cas d'intoxication par cet élément (pen-
sez-y, si vous habitez à proximité d'une usine qui en fabrique).
Mais la résine présente quelques inconvénients. Il ne faut pas en abu-
ser, faute de quoi on s'expose à quelques troubles désagréables (ver-
tiges, nausées, etc.). Les bourgeons du sapin et du pin, surtout ceux
de ce dernier (pour être plus précis : surtout ceux du pin sylvestre),
ne recèlent pas les mêmes dangers, tout en restant très efficaces. Non
seulement vous pouvez les employer contre les maladies de l'appareil
urinaire (inflammation des reins, cystite, blennorragie, etc.), mais
encore ils se montrent actifs contre la toux, la grippe, la coqueluche,
les embarras pulmonaires et I'asthme. En outre, ils donneni d,excel-
lents résultats contre le scorbut, ils provoquent la sueur, et ils calment
les spasmes de l'estomac et de I'intestin. une friction énergique, une
lotion ou un bon bain de bourgeons de pin, peuvent guérir I acné et les
maladies de la peau en général, ou bien encore < requinquer > un sujet
déprimé, neurasthénique, apathique, ou bien encore soutenir un coeur
défaillant et < remettre à neuf > un foie épuisé par les excès. Faut-il
ajouter qu'on peut attendre les meilleurs effets des bains de vapeur aux
bourgeons? C'est aux sujets anémiques et aux enfants rachitiques,
alors, que je les recommanderai. En précisant bien que ce traitement,
pour être populaire, n'en est pas moins reconnu par les plus hautes
autorités médicales. N'assiste-t-on pas à cet étrange phénomène que
la vapeur donne aux urines l'odeur de violette caractéristique de la
résine ? Telles sont les vertus de mes chères plantes...
Quant à l'essence de térébenthine, extraite par distillation de la téré-
benthine, c'est-à-dire de la résine purifiée et déshydratée, ses utilisa-
tions sont multiples. Une bonne partie de la production annuelle est
absorbée par I'industrie pharmaceutique. Au reste, le médicament est
connu depuis fort longtemps, puisqu'on I'employait dès le haut Moyen
Age sous le nom d'aqua ardens, eau ardente. Rien n'interdit,
aujourd'hui, d'en rétudier les qualités. A I'extérieur - et uniquement
à l'extérieur -, l'essence de térébenthine est un révulsif et un rubéfiant
efficace (elle attire le sang soit hors des parties lésées, pour les soulager,
soit vers elles, pour hâter l'intervention des défenseurs de I'organisme,
les globules blancs). Non seulement elle guérit les ulcères et les brûlu-
res, mais elle calme les névralgies. Tous les rhumatisants, tous ceux qui
souffrent d'une sciatique ou d'un lumbago, auront intérêt à y faire
appel. Et de même, un bon cataplasme imbibé d'essence de térében-
thine peut faire merveille contre les bronchites, les maux de gorge,
la coqueluche et les pneumonies. C'est là un éventail étonnant de pro-
priétés. Il y a, à mes yeux, comme de la magie dans les productions
médicinales des conifères. Ne vous disais-je pas tout à I'heure, que
c'étaient de bien généreux végétaux? Que d'ingratitude, chez les hom-
mes qui les abattent par forêts entières, pour de l'argent.,. < Arrête
un peu le bras >, disait notre grand poète Ronsard au bûcheron. Il
faudrait arrêter de saccager la nature... En aurons-nous la force et
les moyens? C'est qu'il est déjà bien tard.
RECOLTE :
Il convient de ramasser les bourgeons du pin sylvestre
(éventuellement d'autres pins, de l'épicéa ou du sapin) au printemps,
lorsqu'ils sont bien tendres et bien collants de résine fraîche. Tâchez
de les conserver le plus longtemps possible, à I'abri de I'humidité.
C'est également au printemps que la résine est la plus riche. Entaillez
un tronc pour en recueillir les larmes, comme le font les gemmeurs des
Landes. L'essence de térébenthine ne manque pas dans les bonnes
herboristeries. ll suffit qu'elle soit garantie pure, sans adjuvants
chimiques. Vous pouvez également, si vous le voulez, cueillir les jeunes
feuilles (aiguilles) de l'année, et les utiliser comme des bourgeons :
elles sont moins actives. Rien ne vous empêche, enfin, pendant que
vous êtes en forêt, de faire provision... d'oxygène. Et c'est même peut-
être la meilleure garantie de succès pour votre cure.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
BOULETTES
de résine : avalez chaque jour la grosseur d'une larme de
résine pure, pendant 7 iours. (Cure de printemps, contre les maladies
du système respiratoire. )
PILULES
de résine (contre les maladies du système urinaire)
mêlez 3 cuillerées à soupe de résine et 6 cuillerées à soupe de réglisse
en poudre; malaxez; prenez-en la valeur d'un grain de café par jour.
POMMADE
à la résine (pour toutes les applications externes)
mélangez 4 parties d'huile d'amandes douces et 4 parties de résine ;
chauffez légèrement aubain-marie ; ajoutez-y une partie de cire d'abeilles.
INFUSION
de bourgeons : jetez en une petite poignée dans un litre
d'eau. (2 à 3 tasses par jour.)
DÉCOCTION
de bourgeons (pour l'usage externe) : jetez une grosse
poignée de bourgeons dans un litre d'eau. (Lotions, compresses, etc.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS
de bourgeons : mêmes proportions que pour la recette
précédente.
VAPEUR
de bourgeons : faites bouillir pendant plusieurs heures
une grande bassine d'eau et de bourgeons dans une petite pièce bien close
genre sauna
FRICTIONS
à I'essence de térébenthine : faites-les à l'essence pure
ou à l'essence étendue d'huile de camphre.
LA SARRIETTE
Mon père la tenait en très haute estime. ( petit, me disait-
il quand nous allions ensemble la chercher dans les collines : c'est
la plante du bonheur! ) J'étais, à la vérité, assez heureux de battre
ainsi la campagne et d'apprendre de sa bouche tous les secrets des
herbes. Mais je n'ai compris que plus tard de quel bonheur il voulait
parler. Les moines, autrefois, n'avaient pas le droit de planter la sar-
riette dans leurs jardins : c'est qu'il s'agit d'une herbe d'amour! Les
Grecs la dédiaient à Dionysos (le Bacchus des Latins), le maître des
faunes et des satyres, pour lequel on célébrait de délirantes orgies; et
je la vois parfaitement, ma chère sarriette, orner le front de quelque
joyeux luron mi-homme mi-bouc, à la poursuite d'une nymphe effa-
rouchée dans les bois épais d'Epire... Les philtres d'amour que
j'aime à confectionner ne comportent ni cantharide, ni corne de rhino-
céros, ni cafards broyés, ni bave de crapaud, ni venin de serpent : ils
sont infrniment .plus simples... et plus engageants. J'y mets de la
sarriette, de la berce, du fenugrec et de la chélidoine. Ou bien je me
contente de conseiller aux couples qui veulent retrouver leur harmonie
conjugale de saupoudrer leurs viandes de sarriette passée au moulin à
poivre. Ou encore, fidèle en cela aux traitements par osmose que
m'a enseignés mon père, je dis aux hommes impuissants et aux
femmes frigides : frottez-vous donc la colonne vertébrale avec une
décoction de sarriette et de fenugrec...
La sarriette, dont on connaît essentiellement deux espèces, I'une des
jardins (ou sarriette annuelle, ou poivrette, ou sadrée, ou savourée,
ou encore herbe de saint Julien), et l'autre des montagnes (que les
Provençaux appellent pebre d'aî), est une proche cousine du thym,
de la lavande et de la sauge (famille des labiées). On la distingue aisé-
ment à ses feuilles grisâtres, à ses tiges un peu rouges, et à ses fleurs
minuscules, blanches ou rosées. Elle est originaire des contrées médi-
terranéennes, où elle hante les rocailles et les landes arides. L'espèce
des jardins, plus résistante au froid et à I'humidité que sa sæur des
montagnes, se cultive aujourd'hui un peu partout, et s'échappe des
jardins pour aller courir le vaste monde...
La sarriette est connue depuis les temps les plus reculés comme aphro-
disiaque. Mais on lui a découvert bien d'autres vertus : au Moyen
Age, sainte Hildegarde et Albert le Grand la recommandaient contre
la goutte, la paralysie, les diarrhées, les pertes blanches et l'interrup-
tion des règles chez les femmes. Je la crois quant à moi essentiellement
stimulante. Elle est digestive (ce qui justifie son emploi en cuisine :
une branche de sarriette vous aidera à bien assimiler les plats les plus
lourds - gibier, ragoûts, féculents...). Elle est carminative, c'est-à-dire
qu'elle aide à la libération des gaz intestinaux. Elle est antidiarrhéi-
que (aussi active contre les diarrhées aiguës que contre les diarrhées
chroniques). Elle est purgative, vermifuge et diurétique, ce qui la fait
recommander dans tous les cas d'auto-intoxication (goutte, rhuma-
tismes, calculs urinaires, etc.) ou d'intoxication par des parasites (vers
solitaire, vers ronds). Elle guérit fort bien les crampes d'estomac,
calme les crises d'asthme, soigne les maux de bouche ou de gorge,
exerce une action favorable sur I'appareil respiratoire (qu'elle débar-
rasse de ses mucosités), et fortifie les enfants délicats.
RECOLTE :
Si vous habitez le Midi, ou si vous y passez vos vacan-
ces, je ne saurais trop vous engager à battre la campagne à la recherche
de la sarriette : vous vous y oxygénerez, et vous ramènerez de votre
promenade la plus utile et la plus coquine des simples (elle fleurit
pendant tout l'été). Mais vous pouvez également cultiver la sarriette
des jardins au potager : elle aime les sols légers et assez riches. Sernez-
la en place, en février-mars au sud de la Loire, en avril au nord de ce
fleuve : dès lors, votre carré de sarriette s'entretiendra de lui-même,
pourvu que vous en laissiez quelques pieds monter en graines. Cueil-
lez la plante entière, au ras de 1a racine, juste avant la floraison, et
faites-la sécher à l'ombre, en petits bouquets suspendus à un fiI.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION :
jetez une petite poignée de sarriette fraîche ou sèche dans
un litre d'eau, (2 à 4 tasses par jour, dont une le soir au coucher. si vous
avez des... projets:)
INFUSION OU DÉCOCTION
pour l'usage externe (lotions, compresses, massages,
gargarismes) : jetez une poignée et demie de plante par litre d'eau.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
mêmes proportions.
INFUSION COMPLEXE
contre l'impuissance : buvez, matin et soir, pendant
40 jours, une infusion à 6 pincées de sarriette, 2 de romarin, 2 de menthe
et 2 de verveine par litre puis, les trois jours suivants, prenez une infu-
sion de sarriette seule, mais à 6 pincées pour un bol d'eau bouillante.
LA SAUGE
Son nom, à lui seul, est tout un programme : il vient
du latin salvare, < guérir >. Et I'on disait, au XIVe siècle, chez les méde-
cins de l'École de Salerne :
< Pourquoi meurt-il, I'homme dont la sauge pousse au jardin? >
La réponse ne pouvait être que celle de ces mêmes médecins :
< Parce qu'aucune herbe du jardin n'est assez forte contre la mort... >
Certes, la sauge ne vous donnera pas l'immortalité; mais elle vous per-
mettra de passer agréablement, c'est-à-dire en bonne santé, le temps
qui vous est compté sur la terre... N'était-ce pas déjà cette plante que
le médecin grec Dioscoride recommandait contre des affections aussi
diverses que les hémorragies, les coupures, les fièvres, les calculs uri-
naires et I'irrégularité des règles chez les femmes? N'était-ce pas elle
que les Capitulaires de Charlemagne conseillaient de mettre à la pre-
mière place au jardin? Sainte Hildegarde, au XIIe siècle, voyait dans
la sauge une véritable panacée : cela me prendrait une bonne demi-
page d'énumérer toutes les maladies contre lesquelles elle la disait
efficace... Au cours de la grande peste de 1630, à Toulouse, d'astu-
cieux voleurs s'en allaient détrousser les cadavres sans craindre I'hor-
rible contagion; ils furent pris; les < capitouls > leur offrirent la vie
sauve en échange de leur secret; et ils avouèrent : pour résister à I'in-
fection, ils se frottaient le corps d'un vinaigre où ils avaient fait macé-
rer de la sauge, avec un peu de thym, de lavande et de romarin; un
siècle plus tard, dans des circonstances analogues, ils furent imités à
Marseille par d'autres aigrefins, qui ajoutaient de l'ail à leur lotion
antiseptique; depuis lors, le « vinaigre des quatre voleurs » a fait par-
tie de la pharmacopée naturelle, et vous pouvez toujours y avoir
recours en cas d'épidémie (grippe, etc.).
La sauge, que Boccace et d'autres poètes ont dite avoir partie liée
avec le crapaud, c'est-à-dire avec le plus proche suppôt du diable, réunit
en fait toutes les propriétés médicinales de la famille des labiées, à
laquelle elle appartient comme le thym, la menthe et la mélisse. On
en distingue de très nombreuses espèces (sauge verte, sauge des prés,
sauge verveine, sauge éthiopienne), toutes caractérisées par leurs feuil-
les molles et gaufrées, et par leurs fleurs étranges en forme de bec
entrouvert - avec une langue à deux pointes (en réalité le pistil
ancré au milieu de ces jolies corolles). Les deux sauges les plus abon-
dantes et les plus utiles sont la sauge officinale (encore dite grande
sauge, sauge de Catalogne, serve, herbe sacrée, thé de Provence ou
thé de Grèce), qui croît essentiellement dans le Midi, mais qu'on peut
fort bien faire pousser au jardin; et la sauge sclarée (ou toute-bonne,
ou sclarie, ou ornin, ou orvale, ou encore beaume), qui possède à peu
près la même aire d'extension que la vigne, et que d'ailleurs on trouve
très souvent entre les ceps noueux.
La sauge, dont on utilise les feuilles et les fleurs, se montre en premier
lieu stimulante : elle active la circulation du sang et aide merveilleu-
sement le système nerveux dans son travail; je la conseille à tous les
surmenés (notamment aux intellectuels et aux étudiants en période
d'examens), aux anémiques, aux convalescents, aux hypernerveux,
aux neurasthéniques et aux déprimés (une femme atteinte de dépression
nerveuse grave a recouvré tout son tonus en quelques semaines, après
une cure intensive de sauge que je lui avais recommandée.La plante,
en second lieu, se comporte comme un tonique puissant : elle apaise
les vomissements et les diarrhées à répétition, et soutient mieux que
toute autre I'estomac et I'intestin. Ses qualités astringentes la font
utiliser contre les hémorragies, les saignements, les pertes sanguines
anormales des femmes, les pertes blanches et la toux. Ses vertus diuré-
tiques, antispasmodiques et reconstituantes la rendent précieuse contre
les affections aussi gênantes ou graves que la rétention d'urine, la
paresse des reins, les ædèmes, la goutte, les rhumatismes et les migrai-
nes.
Là ne s'arrête pas la liste des vertus de ma chère sauge. Elle est encore
capable de faire tomber la fièvre et stoppe les désagréables sueurs
nocturnes qui accompagnent nombre de maladies infectieuses. Elle
exerce la meilleure action sur le délicat appareil génital de [a femme
(donnant du tonus à I'utérus, régularisant les règles, luttant contre les
pertes blanches, aidant les jeunes filles à trouver leur équilibre hormo-
nal, et combattant les troubles de la ménopause). Elle a encore été
reconnue antidiabétique : sa décoction fait assez rapidement revenir
à la normale le taux des sucres dans le sang. A l'extérieur, elle est
puissamment antiseptique (ce que savaient déjà les < quatre voleurs >
de Toulouse et de Marseille). comme de plus elle guérit les blessures,
arrête le sang et accélère la cicatrisation des tissus, je la recommande
en bains de bouche (contre les gingivites, les inflammations du palais
et de la gorge, les aphtes, les < amygdales > des enfants, les caries et les
abcès dentaires); je la conseille en lotions, en compresses et en bains
contre les plaies, les abcès, les ulcères, les furoncles. les engelures, les
contusions, les foulures et les entorses; je I'indique enfin pour ses ver-
tus de < plante de beauté >, car elle entretient la santé de ra peau comme
aucune autre, et ralentit la chute des cheveux en tonitant et en désin-
fectant le cuir chevelu.
RECOLTE :
Toutes les sauges ont à peu près les mêmes propriétés,
à des degrés divers : cueillez donc dans la nature celle que vous trou-
verez la plus abondante; prenez-en les feuilles et les fleurs juste avant
l'épanouissement (qui peut intervenir à des dates très différentes selon
le lieu, I'altitude et I'espèce); faites sécher le tout à I'ombre, dans un
endroit bien aéré, et conservez votre récolte soit en bouquets suspen-
dus, soit dans des sachets de papier. Si vous voulez cultiver la sauge
au jardin, c'est l'espèce officinale qu'il faut choisir. Elle aime les sols
secs, légers, calcaires et pierreux. Plantez-la soit par pieds entiers
(achetés chez votre horticulteur), soit par éclats de souche, soit par
boutures, soit par marcottage, soit encore par semis; binez-raplusieurs
fois; le premier hiver, au moins (et chaque hiver si vous habitez Ie
Nord du pays), couvrez-la de paille. La récolte a lieu à la Saint-Jean
(24 juin) dans le Midi, et au 15 août dans la région parisienne.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
Utilisez abondamment Ia sauge en cuisine, sur les viandes
grillées, dans les sauces, dans la soupe au pistou, etc. plus vous en userez
et mieux vous vous porterez.
INFUSION
de feuilles et de fleurs : jetez une demi-poignée de mélange
sec dans un litre d'eau. ( Une tasse après les repas, comme tonique, diges-
tif et stimulant ; une tasse au coucher, contre l'insomnie, res angoisses
et les sueurs froides.)
DECOCTION
de feuilles et de fleurs (pour l'usage externe : lotions,
frict ions, shampooings, compresses, douches vaginales, Iavements, et c, ) :
jetez une poignée et demie de sauge dans un litre d'eau.
BAINS DE PIEDS ET DE MAINS :
mêmes proportions que pour Ia décoction précëdente.
VIN
de sauge (fortfiant, reconstituant, etc.) : sur deux poi-
gnées de sauge, versez un litre de vin rouge bouillant; laissez infuser
1/4 d'heure; passez et sucrez à volonté. (Un petit verre aux repas, un
autre au coucher.) Autre recette : Iaissez macérer trois ou quatre
poignées de sauge dans un litre de bon vin blanc ou rouge, pendant une
semaine (un petit verre aux repas).
LIQUEUR
de sauge : vous pouvez préparer une excellente liqueur
parfumée et riche en vertus médicinales, en laissant macérer pendant une
semaine une poignée de sauge dans 1/2 litre d'eau-de-vie. (Une cuille-
rée à café par jour, par voie interne. S'emploie également à I'extérieur,
en frictions sur les points douloureux.)
VIN
de sauge pour l'usage externe (sur les plaies) : laissez
macérer une poignée de sauge dans 1/4 de litre de vin pendant trois jours.
TEINTURE
de sauge : faites macérer pendant deux semaines une
poignée de feuilles de la plante dans 1/4 de litre d'alcool à 90 o ; filtrez
(usage externe : contre les douleurs, en frictions pour accélérer la cir-
culation du sang, etc.).
NOTA :
les mille vertus de la sauge ne I'empêchent pas d'être
contre-indiquée aux individus de tempërament sanguin (très expansifs,
au visage rouge, etc.) ; en effet, elle ne ferait que renforcer leur < excès
de sang >. Au contraire, les bilieux, les mélancoliques, les apathiques,
y trouyeront exactement ce qui leur manque pour être en parfait équilï
bre. Aux personnes qui ont de I'artérite, je recommande une infusion de
sauge et de menthe (une pincée de chaque par bol), et à celles qui sont
atteintes de troubles de la circulation, je conseille d'ajouter à l'infusion
précëdente I pincée d'anis vert, I pincée de basilic et une de verveine.
LE SOUCI
Pourquoi < souci >? pourquoi ce nom? L’espèce est-
elle dangereuse ? Porte-t-elle malheur ? Attire-t-elle la colère des dieux ?
Pas le moins du monde, au contraire : elle est bénéfique. < Souci >
vient du bas latin solsequier, qui signifie qui suit le soleil; et, en
effet, les grosses inflorescences orangées du souci s'ouvrent à I'ascen-
sion de l'astre du jour, comme pour en saluer la puissance...
Il existe deux espèces de soucis en France, l'une cultivée, à fleurs dou-
bles, encore appelée fleur de tous les mois, et l’autre sauvage, à peu
près répandue dans la même zone climatique que la vigne. Elles ont
les mêmes vertus et le même aspect (feuilles oblongues à peine dentées,
fleurs orange s'ouvrant à 9 heures du matin et sé fermant à 5 heures
de I'après-midi); simplement, I'espèce cultivée est beaucoup plus
fournie que l'autre en < pétales > (il s'agit, pour les botanistes, d’au-
tant de vraies fleurs). Le souci, bien qu'il ait été longtemps confondu
avec le pissenlit, était déjà bien connu au Moyen Age par sainte Hil-
degarde et Albert le Graàd, qui le donnaient contre lôs troubles de
I'intestin, les obstructions du foie, les piqûres d'insectes et les morsures
de reptiles. Le médecin italien Matthiole, au XVIe siècle, a été le pre-
mier à le recommander en collyre contre les ophtalmies, les conjonc-
tivites et les inflammations des yeux en général.
Aujourd'hui, on sait la plante stimulante et antispasmodique (par
conséquent utile contre I'asthme, la toux, les palpitations, les insom-
nies et les angoisses). On a prouvé qu'elle exerce une action salutaire
sur le foie et sur la sécrétion de la bile (ce que prétendaient déjà curieu-
sement les adeptes de la médecine des signatures, sur la seule indi-
cation de la couleur jaune des fleurs). On a mis en évidence ses vertus
diurétiques, dépuratives, laxatives et sudorifiques (précieuses en cas
de maladies infectieuses). On a vanté, pour l'usage externe, ses proprié-
tés cicatrisantes - contre les plaies, les contusions, les engelures, les
brûlures, I'eczéma, l'impétigo, les ulcères, les furoncles, les cors, les
verrues et I'acné. On a dit son action contre les vomissements incoer-
cibles, et on a vérifié qu'elle est efficace contre les maladies des yeux.
Je voudrais, pour ma part, insister plus particulièrement sur les quali-
tés < féminines > de I'espèce : des jeunes filles aux dames proches de la
ménopause, toutes auront intérêt à se fier au souci pour régulariser
leur cycle, pour rétablir leurs règles si celles-ci viennent à être blo-
quées anormalement, pour réduire leurs pertes sanguines lôrsqu'elles
sont excessives, etc. Une bonne cure de souci une semaine avant la
date présumée des règles, et c'est l'assurance que cette période difficile
sera passée sans souffrances...
RECOLTE :
Du souci, cueillez les fleurs et les feuilles le matin, avant
le bel épanouissement orangé. Utilisez les fraîches, ou faites-les sécher
à l'ombre, dans un endroit bien aéré. Cultivez la plante au jardin :
c'est un régal pour les yeux, et un gage de bonne santé. Semez les
graines au printemps : vous aurez des fleurs presque toute I'année.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION
de fleurs : comptez une feur par tasse de breuvage. (2 à
3 tasses par jour.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
comptez trois fleurs par litre d'eau.
DÉCOCTION
de fleurs pour l'usage externe : jetez deux fleurs dans
un litre d'eau. (En pansements, compresses, applications locales,
ches vaginales, etc.)
DÉCOCTION
de feuilles pour l'usage externe : jetez une demi-poignée
de feuilles fraîches ou sèches dans un litre d'eau (en apprication sur les
cors, Ies veruues, etc. ) . Les cataplasmes de feuilles fraîches ont les mêmes
vertus.
SUC FRAIS
de feuilles : une cuillerée à cafe par jour, dans une tisane,
contre les vomissements.
COLLYRE
contre les maladies des yeux : jetez une fleur de souci,
avec une demi-poignée de fleurs de bleuet et de fleurs de sauge, dans
un litre d'eau chaude.
POMMADE
(contre les plaies, les ulcères, etc.) : exprimez deux
cuillerées à soupe de jus de feuilles de souci, et mélangez-les intimement
à 500 g de beurre.
LE THYM ET LE SERPOLET
Merveilleuse famille, généreuse famille que celle des
labiées ! Après nous avoir superbement donné la sauge, la mélisse, le
romarin, la menthe, la sarriette, le lamier et dix autres herbes de joie
et de santé, il fallait encore qu'elle nous offre le thym et le serpolet...
Regardez-les, ces deux petits prodiges des clairières, des prés jolis,
des rocailles inondées de soleil et des garrigues parfumées : ne sont-ils
pas attendrissants, avec leurs étroites feuilles ovales toutes poudrées
d'argent, et avec leurs fleurettes délicatement rosées ou teintées de
mauve pâle? N'ont-ils pas la légèreté, la grâce, l'arôme des herbes du
Paradis terrestre? J'aurais tendance à croire, quand je les trouve au
hasard de mes promenades, qu'Adam et Ève n'ont jamais croqué la
pomme, et que nous vivons encore dans I'Eden...
Les Anciens connaissaient fort bien ces deux herbes, au reste très pro-
ches I'une de I'autre, et très variables quant à la forme (le serpolet
rampe davantage que le thym, qui pousse en petits bouquets; ses fleurs
sont aussi un peu plus mauves). Théophraste et Dioscoride, en Grèce,
les disaient propres à calmer les convulsions, à réduire les inflamma-
tions de I'intestin et du foie, à provoquer les règles lorsqu'elles sont
défectueuses, et à calmer les spasmes de toute nature. Charlemagne,
quant à lui, en avait ordonné la culture dans ses Capitulafues, de nos
jours, les gouvernements ne passent plus de décrets concernant les
bonnes herbes, et je le regrette... Je le regrette d'autant plus qu'il se
prive ainsi de moyens de lutte fort efficaces contre les épidémies - les-
quelles, on nous le serine à longueur de journée, coûtent beaucoup
d'argent. Jadis, lorsque la peste ou la lèpre menaçalent, on consom-
mait le plus possible d'aromates, on s'en enduisait le corps, on en
faisait force tisanes; et la méthode n'était pas sotte. Aujourd'hui,
lorsque la grippe arrive, on n'a que... les antibiotiques. Je prétends,
quant à moi, qu'on peut parfaitement préparer son organisme à résis-
ter à de telles épidémies par une consommation régulière d'herbes
antiseptiques - et notamment de thym et de serpolet. Pourquoi ne
pas essayer? Des générations de nos ancêtres s'en sont fort bien trou-
vées. Je ne dis pas qu'il faille s'en tenir à ce qu'ils savaient : mais qui
peut le plus peut le moins; mes prescriptions présentent le double
avantage d'être bon marché et d'être fort simples à suivre...
Le thym et le serpolet ont les mêmes vertus, mais plus marquées chez
le premier des deux. Ils sont stimulants et toniques, ce qui les fait
recommander contre toutes les faiblesses organiques, notamment
celles du système nerveux (neurasthénie, dépression, ( manque de
ressort >, apathie) et du système circulatoire (qui se traduisent par
des vertiges, des migraines, des bourdonnements d'oreilles, etc.).
J'aime à dire, sous ce rapport, qu'il faut pratiquer le thym et le ser-
polet comme une hygiène. Ils constituent en outre les meilleurs amis
de I'estomac et de I'appareil digestif - ce qui justifie leur emploi
en cuisine (sur les viandes, dans les sauces, dans les soupes). Ils sont
antispasmodiques, c'est-à-dire qu'ils luttent efficacement contre
tous les spasmes, depuis la coqueluche et la toux jusqu'aux palpi-
tations, en passant par les crampes d'estomac, l'asthme et l'insomnie.
Ils sont diurétiques, ce qui les fait indiquer contre les faiblesses des
reins et de la vessie, contre la rétention d'urine, contre les rhuma-
tismes et contre la goutte. Ils sont vermifuges (je les conseille tout
particulièrement aux enfants, parce qu'ils les tonifient en même temps
qu'ils les débarrassent de.leurs parasites). Ils régularisent le cycle des
femmes. Ils exercent la meilleure action dans tous les troubles de
I'appareil respiratoire (rhumes, angines, bronchites, pneumonies,
pleurésies). Par-dessus tout, après une longue carrière de phytothé-
rapeute, je tiens à remercier le thym et le serpolet pour leur pou-
voir antiseptique : comme ils éliminent les virus et les bactéries dans
l'atmosphère par leur arôme (dû au thymol, ou < camphre de thym >,
qu'ils contiennent), ils détruisent ces germes infectieux dans I'orga-
nisme. Ainsi, du furoncle à la fièvre typhoïde et du panaris à la tuber-
culose, je ne connais pas une maladie à microbes qui ne puisse être
soulagée par mes deux chères petites plantes. (Bien évidemment,
dans les cas bénins, le thym et le serpolet suffisent, alors qu'ils doi-
vent être de simples alliés du médecin dans les cas graves).
A I'extérieur, outre les affections où il importe de désinfecter (plaies,
abcès, ulcères, brûlures, etc.), le thym et le serpolet peuvent rendre les
meilleurs services contre les contusions, les foulures, les bleus, la
goutte, les rhumatismes et les maux de dents; il vous faudra administrer
ces remèdes, selon les cas, en compresses, en pansements, en lotions, etc.
Les bains complets de thym et de serpolet sont fort efficaces contre
le rachitisme. Les bains locaux de ces plantes soulagent les douleurs
des seins chez les femmes, et soignent les inflammations des yeux
chez les petits enfants.
RÉCOLTE :
Le serpolet (que I'on appelle encore thym sauvage,
thym rouge, thym bâtard, poulliot, pouilleux, poujeu, poleur, ser-
poule, bouquet, sent-bon, etc.), fleurit de la fin du printemps à I'au-
tomne. dans la majeure partie de I'Europe; récoltez-le dans la nature
lorsqu'il a le plus de parfum, et faitesle sécher en petits bouquets
dans un endroit bien aéré.
Le thym vrai (que I'on nomme aussi thym commun, farigoule, bari-
goule, frigoule ou pote), a des < moeurs > plus méridionales : il lui
faut du soleil pour épanouir ses jolies fleurettes en été. Récoltez-le
au hasard de vos promenades dans le Midi, et faitesle également
sécher en petits bouquets.
Si vous voulez le cultiver au jardin (ce qui vaut évidemment mieux
que de l'acheter dans n'importe quel magasin, sans aucune garantie
de pureté), alors choisissez pour lui un sol léger, calcaire et pierreux :
l'humidité lui est fatale. Achetez-en quelques pieds chez votre horti-
culteur, et mettez-les en terre plein Sud, si possible sous un mur qui
les protège des vents froids et leur renvoie la lumière. Récoltez en
été, en laissant quelques pousses faire des graines pour l'année suivante.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
Usez du thym et du serpolet de toutes les façons possibles
en cuisine. Pour le reste, voici quelques recettes éproutées :
1o) SERPOLET
INFUSION :
jetez une dizaine de brins de serpolet dans un litre d'eau,
(3 à 4 tasses par jour.)
INFUSION CONCENTRÉE
pour l'usage externe : jetez une poignée de serpolet
dans un litre d'eau. (En lotions, compresses, massages.,.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS, DOUCHES VAGINALES :
mêmes proportions que pour I'infusion concentrée.
POUDRE
de serpolet : écrasez longuement une branche de ser-
polet dans un mortier ou sous une bouteille ; recueillez Ia poudre, et
mélangez-la à du miel. (Dose pour la journée.)
LIQUEUR
de serpolet : faites macérer 3 ou 4 branches de plante
sèche oufraîche dans 1/4 de litre d'eau-de-vie. (Une cuillerée à café,
de temps à autre.)
TISANE COMPOSÉE
(pour ceux qui souffrent du foie) : jetez une pincée de
serpolet et une pincée d'anis vert par tasse d'eau. (Une tasse chaque
soir. )
2 o) THYM
INFUSION :
comptez une petite branche de thym par tasse de breuvage,
et ajoutez-y éventuellement quelques feuilles de menthe, de mélisse
ou de sarriette. (2 tasses par .jour,)
INFUSION OU DÉCOCTION
pour l'usage externe (compresses, lotions, etc.) : jetez
2 à 3 poignées de thym dans un litre d'eau.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
mêmes proportions que pour la recette précédente.
POUDRE
de thym : procédez comme pour Ia poudre de serpolet.
(Une petite branche écrasée par jour, dans du miel.)
GARGARISMES
au thym : faites bouillir pendant I/4 d'heure une poignée
de thym dans 2 litres d'eau; sucrez au miel.
DENTIFRICE
au thym : faites macérer 3 poignées de plante dans 1/2
litre d'eau-de-vie, et frottez-vous les dents chaque jour en trempant
votre brosse dans cette préparation.
POUR FINIR,
un bon conseil : si vous voulez passer un hiver sans
rhume, faites une petite cure préventive de thym et de serpolet, en
prenant tous les soirs une infusion bien chaude à 2 pincées de chaque
plante par bol.
LE TILLEUL
C'est un arbre superbe que le tilleul, haut de 15 à
20 m, et toujours rempli de chants d'oiseaux. Ils savent, nos petits
amis emplumés, où respirer l'air le plus embaumé, et où prendre des
forces en prévision du rude hiver... Ils savent aussi où trouver le calme
et le repos : car c'est le symbole même du repos et de la douceur
qu'ils peuplent de leurs nids douillets... Le tilleul d'Europe, qui borde
les plus belles avenues de nos villes et qui parfume à lui seul des hec-
tares de campagne, désigne en réalité plusieurs espèces très proches,
l'une à petites feuilles (ou tilleul des bois, ou tilleul mâle), la seconde
à feuilles moyennes (ou tilleul de Hollande), et la troisième à grandes
feuilles (ou tilleul femelle). Mais peu importe : toutes ont le même
nectar pour les abeilles, et toutes ont les mêmes vertus pour les hommes
et les femmes.
Ce n'est guère qu'au XVIIIe siècle qu'on a commencé à utiliser les feuilles
et les fleurs du tilleul en phytothérapie; jusque-là, on se contentait
de son écorce, et encore : contre les seules maladies des yeux. Le végétal
est pourtant un concentré de merveilleuses propriétés. N’y cherchez
pas I'excitant, le tonique, le < coup de poing > : il agit avec la lenteur,
la majesté et I'assurance que lui confère sa taille; il a des siècles à
vivre, et il entend prolonger l'existence des autres en donnant I'exemple
de la modération et de Ia régularité des comportements. Il est anti-
spasmodique et calmant : rien de meilleur qu'une bonne infusion
de tilleul pour passer une bonne nuit. Je la recommande à tous, mais
d'abord aux nerveux, aux insomniaques chroniques, aux angoissés,
aux inquiets, aux enfants agités et aux vieillards qui peinent à trouver
le sommeil. c'est le tilleul qui apportera le repos bienfaisant à ceux
qui toussent, aux asthmatiques, aux migraineux, aux cardiaques.
C'est lui aussi qui, grâce à ses vertus antipléthoriques, nettoie
le sang, le rend plus fluide, prévenant en cela I'artériosclérose, les
phlébites, les angines de poitrine et les infarctus (il ne peut évidemment
plus grand-chose lorsque la maladie est déclarée : c'est pourquoi
je vous recommande de commencer votre cure au plus vite).
Le tilleul est encore légèrement diurétique (excellent pour les goutteux,
les rhumatisants); il provoque la sueur (ce qui contribue à purger
I'organisme de ses toxines); en application externe, il exerce le meilleur
effet sur les brûlures, les abcès, les furoncles et les inflammations
qu'il adoucit merveilleusement. C'est l'un des composants de ma
< tisane du bonheur >, celle qui vous assurera des nuits calmes, des
matins reposés et des journées détendues, si vous en prenez réguliè-
fement.
RECOLTE :
N'allez pas cueillir vos fleurs, vos feuilles et votre
écorce de tilleul dans l'atmosphère polluée des villes (à moins que
vous n'habitiez Carpentras, la ville du tilleul)! Choisissez au contraire
un arbre éloigné des habitations, et munissez-vous d'un grand sac,
car vous aurez besoin d'une récolte abondante pour toute l'année.
C'est généralement en juin-juillet que les fleurs sont épanouies :
coupez-les avec leur bractée, c'est-à-dire avec la languette pâle qui
les accompagne, et faites-les sécher rapidement en les étalant à I'ombre,
sans les remuer; conservez-les à l'abri de I'humidité. Pour les feuilles
et l'écorce des jeunes rameaux, mieux vaut procéder au ramassage
au printemps, à la montée de la sève.
PREPARATION ET EMPLOI :
INFUSION
de fleurs : jetez une bonne poignée de fleurs sèches dans
un litre d'eau. (3 à 4 tasses par jour, dont une au coucher.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS, BAINS COMPLETS
de tilleul : comptez une poignée et demie de fleurs par
Iitre d'eau.
DECOCTION
de feuilles : jetez une demi-poignée de feuilles fraîches
ou sèches dans un litre d'eau. (2 à 3 tasses par jour.)
d'écorce : comptez une demi-poignée d,écorce pilée
par litre d'eau. (Usage interne : I à 2 tasses par jour.)
Usage externe :
en lotions, pansements, etc., notamment contre les brûlures.)
DECOCTION CONCENTREE
de feuilles (pour l'usage externe : lotions, compresses,
etc.) : jetez 3 à 4 poignées de feuilles fraîches ou sèches dans un litre
d'eau.
LA VERVEINE
Il y a deux verveines : l'une, maigre, squelettique,
aux rameaux décharnés, aux fleurs petites et aux courtes feuilles très
irrégulièrement dentées – c’est la verveine officinale, qu'on jurerait
bâtie de fil de fer; l'autre, beaucoup plus grande, à l'ample feuillage
et à I'odeur entêtante de citron - ç'est la verveine citronnelle. La
première est naturelle en Europe : elle hante les terrains vagues,
les talus, les décombres, et elle plaît tout particulièrement aux abeilles.
La seconde vient d'Amérique du Sud, mais elle est de plus en plus
cultivée'dans le Midi depuis qu'elle a été introduite dans le vieux
Monde (au XVIIIe siècle); c'est cette dernière qui est de loin la plus
active, et c'est d'elle que l'on parle en général maintenant lorsqu'on
prononce le mot verveine.
La verveine officinale, encore dite verveine sauvage, herbe à tous les
maux, menthe de chat, herbe du foie, herbe du sang, herbe sacrée,
herbe aux sorciers, ou herbe aux enchantements, a une prodigieuse
histoire. On en faisait des couronnes pour les ambassadeurs et les
notables dans tout le monde gréco-latin; on ne se servait que d'elle
pour nettoyer I'autel du roi des dieux, Jupiter; les sorciers et les magi-
ciens lui attribuaient des propriétés prodigieuses, comme de guérir
toutes les blessures de guerre et de donner I'immortalité aux braves
Les Gaulois I'honoraient presque à l'égal du gui. Les enchanteurs
du Moyen Age étaient censés I'utiliser dans leurs manipulations
merveilleuses. Elle entrait dans la préparation de tous les philtres
magiques. Et on ne l'oubliait pas comme herbe à guérir, puisque
c'était la panacée de tous les maux (jaunisse, ulcères, maladies des
reins, maladies du coeur, rages de dents, accouchements difficiles, etc.).
Aujourd'hui, elle connaît une étrange éclipse. Non pas, certes, qu'elle
soit réellement capable de tout soigner. Mais j'ai apprécié son action
bénéfique en plus d'une occasion. Elle est tonique, antispasmodique
(utile contre la nervosité, la toux, I'insomnie, les angoisses) et elle fait
assez bien tomber la lièvre. De plus, elle nettoie I'organisme, resserre
les tissus, et prépare la guérison des plaies ou des infections. Essayez-la
contre la goutte, les rhumatismes, la jaunisse, les fièvres et les dou-
leurs d'origine nerveuse. Employez-la à l'extérieur contre les angines,
les amygdalites, les maux de gorge (en gargarismes), contre les mi-
graines (en compresses sur le front), contre les ulcères, les brûlures,
les coupures et les bleus (en pansements).
La verveine citronnelle, que I'on baptise aussi verveine des Indes,
verveine du Pérou (ou du Chili, ou d'Argentine), verveine à trois
feuilles ou citronnelle, a sur sa vieille cousine européenne I'avantage
de la jeunesse, on ne la connaît que depuis deux siècles... Elle est
aussi, incontestablement, plus énergique dans ses interventions, ce
qui ne constitue pas forcément un bon point (certaines maladies exigent
d'être traitées en douceur). Elle est excitante, ce qui la fait recommander
aux apathiques, aux déprimés et aux neurasthéniques. Elle combat
excellemment les spasmes (crampes d'estomac, palpitations, asthme,
etc.). Elle fait tomber la fièvre. Elle soigne bien les névralgies, les
migraines, les vertiges, le surmenage intellectuel. Et surtout, c’est
une amie sûre de l'estomac : si vous ressentez des aigreurs, si votre
digestion est difficile, si vous êtes sujet aux ballonnements, alors
c'est cette verveine-là qu'il vous faut. Il s'en fait actuellement une
très grosse consommation : je ne vois aucun inconvénient à ce que
vous vous joigniez à la troupe des verveinomanes - à condition
que vous vous serviez dans une bonne herboristerie, ou que vous
achetiez directement votre tisane à un producteur < biologique >
(si vous la cultivez vous-même, je n'ai plus rien à dire).
RECOLTE :
Allez cueillir la verveine officinale dans la campagne,
ou plantez-la au jardin; elle s'accommode de tous les sols. Coupez-la
au ras de la racine juste avant la floraison complète, et faitesla sécher
en petits bouquets suspendus à I'ombre.
si vous voulez cultiver la verveine citronnelle, il vous faut absolument
habiter les rivages de la Méditerranée : elle ne supporte pas le froid.
Plantez-la dans une terre riche et perméable, et arrosez-la très souvent
en été, faute de quoi elle perdrait ses feuilles - et vous perdriez du
même coup la majeure partie de votre récolte. cueillez lesdites feuilles,
ainsi que les extrémités fleuries du végétal, au moment de la floraison,
et faites sécher le tout en petits bouquets suspendus, à l,ombre.
PREPARATION ET EMPLOI :
1) VERVEINE OFFICINALE
INFUSION ..
jetez I0 à 15 pincées de plante sèche dans un litre d'eau.
(2 ou 3 tasses par iour.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
mêmes proportions que pour la décoction précédente.
2) VERVEINE CITRONNELLE
INFUSION :
jetez 10 à 15 pincées de fleurs et de feuilles dans un litre
d'eau. (2 tasses par jour : c'est un breuvage délicieux, mais n'en abusez
pas. Si vous voulez une boisson à la verveine , à prendre à volonté,
alors abaissez la dose à 3 pincées de plante par litre d'eau.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
comptez une poignée de plante par litre d'eau.
TEINTURE
de verveine : faites macérer pendant 3 jours 4 ou 5 feuilles
fraîches dans 1/4 de litre d'alcool. (Usage externe : en massages sur le
ventre, contre les maladies de l'estomac.)
NOTA :
La verveine est, avec le tilleul, la menthe et la camomille,
I'une des plantes qui entrent dans la composition de ma tisane du
bonheur.
LA VIOLETTE
S'il est une fleur mignonne, s'il est une fleur modeste,
s'il est une fleur que j'aime (mais je les aime toutes!), c'est bien la
violette. Il n'y a pas de corolle qui soit plus timide, et il n'y en a pas
qui me paraisse plus délicieusement odorante : mon père sentait
bon la violette; c'était son parfum préféré; il le distillait lui-même...
Gageons que plus d'un adulte, endurci et blasé, aura senti son coeur
battre plus vite en découvrant, aux premiers rayons du soleil nouveau,
une petite touffe de ces fleurs sous un mur... Ne rions pas de cet
enfantillage : il est le signe que l'homme et la nature ne sont pas
irrémédiablement opposés. Et allons à notre tour régaler notre oeil
et nos narines parmi les haies vives que les violettes rehaussent d'amé-
thystes...
Pour les Anciens, la violette était une fleur sacrée : on s'en teignait
la tête au cours des fêtes en I'honneur de Saturne, et on la dédiait au
grand Pan, le dieu étrange et tout-puissant de la Nature et de la Vie
même... A Athènes comme à Rome, pourtant, on n'oubliait pas ses
vertus thérapeutiques. C'est le vieil Hippocrate lui-même, le père
de la médecine, qui I'a le premier recommandée contre les maux de
tête, les vapeurs de l'ivresse et les troubles de ta vue. C'est lui aussi
qui I'a conseillée contre la mélancolie, I'excès de bile et les inflammations
de la poitrine. Au Moyen Age, on a été jusqu'à en faire un remède
contre le cancer. Le grand savant arabe Meshué était plus sage, à
la même époque, lorsqu'il ne l'indiquait que contre la constipation,
l'angine, l'insomnie et les maladies du foie... Ensuite, la violette
a connu des fortunes diverses, exaltée par certains, critiquée par
d'autres. Tous, cependant, se sont accordés à en faire un élément
indispensable de la pharmacie naturelle.
Naturellement, il existe de nombreuses espèces de violettes, mais on
peut les grouper en deux catégories : celles dont les fleurs ont trois
pétales en haut et deux en bas (les violettes oàorantes), et celles dont
les fleurs ont quatre pétales en haut et un seul en bas (les pensées).
En ce qui concerne les premières, les plus abondantes sont la violette
hérissée, la violette des chiens, la violette des bois et surtout la vio-
lette odorante vraie (encore dite violette des haies, violette de mars,
violette de carême, violier, jacée du printemps, etc.). Généralement
nommées pensées sauvages, les secondes comprennent la pensée des
Alpes, la pensée jaune et la pensée tricolore (la plus commune dans
les champs, encore baptisée petite jacée, herbe de la Trinité ou fleur
de la Trinité).
Rien n'est plus utile à la santé que ces jolies plantes. En infusions
surtout, mais également en décoctions, en sirops - ou dans les confi-
series chères à la ville des violettes, c'est-à-dire à Toulouse (bonbons,
confitures, pâtes de fleurs, pralines, etc.) -, elles font merveille contre
nombre de petits et de grands malaises. Dans la fameuse tisane
pectorale des sept fleurs, elles s'unissent au coquelicot, à la mauve,
à la guimauve, au pied-de-chat, au tussilage et au bouillon-blanc,
pour soigner les rhumes, les angines, les bronchites, les pneumonies,
la coqueluche et toutes les maladies de I'appareil respiratoire. Elles
sont, en elles-mêmes, béchiques, c'est-à-dire qu'elles calment la
toux. Plus généralement, elles se montrent calmantes et toniques;
la substance douce (mucilage) que leurs feuilles sécrètent en quantité
est utile contre toutes les inflammations (internes ou externes), contre
les maladies des yeux, contre les irritations de I'estomac et de l'intes-
tin. Racines et graines sont vomitives (qu'on y pense en cas d'empoi-
sonnement) et purgatives (ce qui les rend précieuses dans de nom-
breuses maladies d'auto-intoxication : constipation chronique, etc.).
On dit aussi, à juste raison, que I'ensemble de la plante est laxative.
Faut-il ajouter encore que, dans les annales de la médecine officielle,
on cite le cas d'un homme qui se serait guéri d'un cancer de la gorge
à coups d'infusions et de compresses de violette? En tout cas, même
s'il s'agit d'une coïncidence, la fleur n'a pu qu'aider I'heureux res-
capé à renforcer ses défenses naturelles...
RECOLTE :
Selon la saison et le lieu où vous vivez, récoltez la
violette odorante, la pensée sauvage, la pensée des Alpes, etc. Soi-
gnez tout particulièrement votre cueillette. ll faut y procéder le matin
très tôt, par temps sec, juste après la rosée. On doit surtout éviter
d'entasser les plantes les unes sur les autres. N'utilisez que les fleurs
et les feuilles, ou, si vous avez plus de courage, détenez les racines
et ramassez les graines à maturité; faites sécher à I'ombre (pour
conserver aux fleurs leur jolie teinte et leur parfum), et gardez la
plante soit en sachets de papier (à I'abri de l'humidité), soit en petits
bouquets pendus au plafond
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION ET DÉCOCTION
de fleurs (rhumes, bronchites) : jetez une demi-poignée
de fleurs fraîches ou sèches dans un litre d'eau. (4 tasses par jour.)
de plante entière (comme régulateur des voies respi-
ratoires et digestives) : jetez une demï poignée de végétal dans un
Iitre d'eau. (2 à 3 tasses par jour.)
DÉCOCTION
de racines, très purgative et vomitive : comptez l/2 poi-
de racines par litre d'eau; faites bouillir 15 minutes. (Une
par jour.)
INFUSION
de feuilles (laxatif léger) : comptez I/2 poignée de
feuilles par litre d'eau. (2 tasses par jour.)
SIROP
de violettes odorantes : faites infuser pendant I/2 journée
3 poignées de fleurs fraîches dans un litre d'eau, et un kilo de sucre.
Faites réduire une heure au bain-marie, et mettez en bouteilles.
(3 cuillerées à soupe par jour. En gargarismes, contre les angines, les
rhumes, les bronchites.)
JUS
de feuilles fraîches : 3 ou 4 cuillerées à soupe par jour
(comme purgatif).
POUDRE
de racines : 2 ou 3 pincées par jour, dans du miel ou
du lait.
TISANE
de fleurs (usage externe : compresses, Iotions, etc.) :
comptez une poignée de fleurs fraîches ou sèches par lifte d,eau.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
mêmes proportions que pour la décoction précédente.
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