plantes E
L'EGLANTIER
Tout est curieux dans ce que j'aime à appeler la version
champêtre de la reine des fleurs - et d'abord le nom latin : Rosa
canina ou rosier des chiens ; il ne vient pas de ce que nos amis à
quatre pattes se prélassent volontiers parmi les rameaux bardés d'ai-
guillons, mais de I'ancienne croyance selon laquelle la racine du végétal
guérit la rage. S'il existe des dizaines d'espèces de roses sauvages
(Marcel Proust vantait < la soie unie de leur corsage rougissant qu'un
souffie défait >), celle-ci est la plus commune. On la trouve en épais
nuages verts, dans les sous-bois d'ombre claire ou au coeur des haies
confuses : c'est 1à qu'elle épanouit le mieux, entre des panaches de
feuilles à cinq ou sept folioles dentées, les larges coupes de ses fleurs
immaculées ou rose pâle, au creux tout frisotté d'étamines...
Les feuilles de la plante, comme ses semences d'ailleurs, n'ont jamais
servi que de succédané au thé : mais je ne recommande à personne
d'essayer (à forte dose, lesdites semences exercent une action néfaste
sur la moelle épinière et le coeur). Les pétales, en décoction ou en infu-
sion, ont un léger effet laxatif, et il m'est arrivé de les conseiller en
mélange avec ceux de la rose rouge. Mais de l'églantier, ce qu'il faut
avant tout retenir, c'est d'une part le bédégar, et de I'autre le fruit.
L'éponge de rose, ou bédégar (le mot nous vient de Perse par le canal
des plus grands médecins arabes), désigne cette sorte de tête chevelue
pourpre vert, que I'on trouve à I'extrémité de certaines tiges, et qui
est une galle due à la piqûre d'un insecte voisin de I'abeille (hyménop-
tère) : le cynips de la rose. Il s'agit d'un excellent tonique (je I'utilise
pour renforcer les défenses naturelles des sujets affaiblis), d'un astrin-
gent (il hâte la cicatrisation des plaies et des brûlures à bord décollé),
d'un produit actif contre la sueur (il fait merveille en cas de fièvre),
et d'un diurétique efficace (certains calculs urinaires même ne lui
résistent pas). L'infusion et la décoction en sont simples à préparer,
mais quelques phytothérapeutes en tirent aussi par distillation une
eau propre à soigner les yeux malades.
Le fruit, ce globule ovoïde rouge-orangé que I'on récolte aux premiers
frimas, est en fait, pour les botanistes, un faux fruit, comme la fraise,
la framboise et la figue. On le baptise scientifiquement cynorrhodon,
mais je lui préfère évidemment ses appellations populaires de gratte-
cul, gargouillou ou gratte-chat. Il est tout empli de semences enrobées
dans un charmant duvet argenté, que les joyeux drilles des noces
et banquets connaissent pour le meilleur des poils à gratter. plai-
santerie à part, le cynorrhodon se consomme en infusion, en décoc-
tion, en poudre, en sirop, en marmelade, en confiture ou en liqueur.
Il est souverain contre les diarrhées, les crampes d'estomac, les nausées
et les digestions difficiles. Aux qualités du bédégar (tonique, astrin-
gent, actif contre la sueur et diurétique) il ajoute les siennes propres :
c'est un vermifuge énergique; c'est aussi un laxatif et un dépuratif
efficace (vidé de ses semences et conservé sec dans un lieu aéré pendant
I'hiver, nul n'est plus propre que lui, au printemps, à nettoyer le
sang des toxines de la mauvaise saison); c'est enfin, par son excep-
tionnelle richesse en vitamines (provitamine A ou carotène, vitamine C,
vitamine D), un ami des yeux, un antiscorbutique de premier plan
et un antirachitique. (100 g de cynorrhodons contiennent autant de
vitamine C qu'un kilo de citrons...)
RÉCOLTE :
Cueillez les feuilles et les fleurs de l'églantier au prin-
temps, les secondes lorsqu'elles sont encore en boutons. vous trou-
verez certainement des bédégars en été. Pour les fruits, il vous faudra
attendre la fin de I'automne et le début de I'hiver : c'est alors seulement
qu'ils sont bien mûrs.
PREPARATION ET EMPLOI :
INFUSION ET DÉCOCTION
de pétales : jetez une demi-poignée de pétales dans
I litre d'eau bouillante. (3 à 4 tasses par jour.)
INFUSION
de bédégar : jetez une poignée de bédégar dans I litre
d'eau bouillante. (2 à 3 tasses par jour.)
de cynorrhodons : jetez une poignée de cynorrhodons
vidés de leurs semences et de leurs poils dans 1 litre d'eau; laissez
10 mn. (3 à 4 tasses par jour.)
DÉCOCTION PROLONGEE
de cynoruhodons : jetez une poignée de cynorrhodons
vidés dans 1 litre d'eau, et faites réduire de moitié (ou laissez infuser
1 heure). Diurétique très efficace. (plusieurs fois par jour.)
POUDRE
de cynorrhodons : râpez très fin les fruits vidés et dessé-
chés. (Antiscorbutique : une petite pincée par jour)
SIROP
de cynorrhodons : faites macérer l'écorce des fruits
pendant 2 à 3 jours dans du vin rouge; passez et aioutez une quantité
égale de sucre ; ne faites pas cuire, cela détruirait la vitamine c.
MARMELADE
decynorrhodons: cueillez les fruits après les premières
gelées ; ôtez les graines et le duvet ; hachez menu; aioutez un poids
égal de sucre et brassez longuement ; ici encore, toute la vitamine C
reste intacte.
CONFITURE
de cynorrhodons : prenez des fruits bien mûrs, mais
qui n’ont pas gelé ; videz-les ; coupez-les en petits morceaux ; arrosez-les
de -vin rouge- et laissez-les macérer 24 heures duns un endroit frais ;
piùz le tout au mortier ; faites passer le mélange au tamis pour recueillir
'la pulpe; dès lors, pour 500 g de pulpe, comptez 750 g de sucre ;
faites cuire le sirop de sucre seul, et délayez-y la pulpe hors du feu,
de façon à conserver le maximum de vitamine C ; mettez en pots.
(préparée de façon << ordinaire >>, la confiture de cynorrhodons reste
excillente au goût, mais perd trop de ses qualités médicinales.)
LIQUEUR
de cynorrhodons : dans 3 litres d'eau-de-vie, faites
macérer pendant 15 jours à 1 mois 1 kg de cynorrhodons et 500 g de
sucre candi; filtrez et additionnez d'eau pure, selon votre goût (Excel-
Ient tonique, que je recommande particulièrement, à petites doses,
aux personnes du troisième âge.)
BAINS DE PIEDS ET DE MAINS :
comptez une poignée de plante par litre d'eau, soit de
fruits, de pétales et de boutons (contre les calculs urinaires), soit de
-pétales et de boutons (contre les palpitations cardiaques, la tachycardie,
lq nervosité, les angoisses), soit de graines broyées (contre I'hypera-
cidité et les douleurs de I'estomac).
L’EPINARD
Point n'est besoin de décrire longuement le légume
favori de Popeye le marin : on sait assez, par les comics et le dessin
animé, qu'il donne à qui le mange une force herculéenne!...
C'est un proche cousin de la betterave, dont on ne connaît même plus
la forme sauvage; on suppose qu'il vient du Moyen-Orient, car le
nom même d'épinard semble dériver du persan aspanach ou de l'arabe
isfinâg. L'épinard que nous connaissons aujourd'hui était déjà
cultivé en Espagne au XIe siècle, et en France au XIIIe. A cette époque,
Albert le Grand vantait ses qualités nutritives.
L'épinard non seulement est riche en chlorophyile et en protéines,
non seulement il aide la digestion, non seulement il stimule toutes
les sécrétions (de I'estomac, du foie, du pancréas, des glandes endo-
crines), mais encore il est essentiellement reminéralisateur. on y
trouve en quantité du fer (la chose est assez connue), mais aussi
du magnésium, du phosphore, de l'iode et de nombreux oligo-éléments
rigoureusement nécessaires au bon équilibre du corps. Je le conseille
expressément aux enfants, aux adolescents, aux convalescents, aux
anémiques et à tous les malades chroniques. Je le recommande tout
particulièrement aux travailleurs intellectuels (pour son phosphore),
aux citadins hyper-pollués (pour son fer, qui permet aux globules
rouges d'accélérer le processus d'oxygénation du sang), enfin à tous
les sujets victimes de maladies de la peau : Popeye devenait imbattable
quand il avait eu sa ration d'épinards; son éternelle fiancée, Olive,
l'aurait plus rapidement séduit si elle avait pensé à la plante pour la
beauté de son teint !
RÉCOLTE :
Je ne saurais trop vous recommander de cultiver
l'épinard au jardin; vous aurez ainsi des produits parfaitement frais,
et garantis < biologiques > (sans insecticides ni engrais chimiques).
L'espèce s'accommode de tous les sols : semez-la en rangs, au prin-
temps, dans un terrain bien fumé.
PREPARATION ET EMPLOI :
Comme légume, accommodez l'épinard à votre façon;
mais ne gâtez pas son action équilibrante et reminéralisante par un
excès de sauce indigeste ! Il en va de ce légume comme des autres :
la préparation la plus simple est aussi la meilleure.
SUC
d'épinards cuits : cuisez si possible vos épinards à la
cocotte, de façon à ce qu'ils conservent bien leurs vertus ; n'en jetez
surtout pas le jus : exprimez-le à travers un linge fin, et buvez-le. (3 à
4 tasses par jour : c'est I'un des meilleurs reconstituants que je connaisse. )
frais : ne le préparez qu'avec des légumes iuste cueillis
et soigneusement lavés. (3 à 4 tasses par iour.)
VIN
d'épinards frais : faites macérer une belle feuille d'épï-
nard dans un verre de vin rouge. (Un verre par jour.)
CONTRE-INDICATION :
à cause de sa richesse en sels, notamment en oxalates,
l'épinard est à déconseiller formellement aux goutteux, aux arthriti-
ques, aux rhumatisants et à ceux qui souffrent de calculs urinaires.
L'ESTRAGON
Ma grand-mère Sophie en mettait partout; sitôt que
j'avais le hoquet, elle m'envoyait au jardin en cueillir un morceau,
et me le faisait mâcher : c'était souverain. De même, quand elle soup-
çonnait que j'avais des vers, c'est au < petit dragon >, comme elle
I'appelait, qu'elle recourait aussitôt : je n'ai jamais eu à m’en plaindre.
J'ai expérimenté par la suite bien d'autres vertus de l'estragon (ou
dragonne, ou encore serpentine); et je vous le recommande dé toutes
les façons possibles : dans vos salades, sur vos biftecks, avec votre
poulet, évidemment. N'oubliez pas d'en ajouter un brin dans vos
conserves de cornichons, de petits oignons et de légumes au vinaigre :
il atténuera I'acidité de ces mets, et leur donnera un parfum délicieux.
L'estragon nous vient des grandes plaines infinies de la sibérie et
de I'ouest de I'Amérique du Nord. c'est une plante de la famille
des composées, comme le pissenlit ou la marguerite, mais qui appar-
tient au genre des armoises, tout comme I'absinthe. Il se caractérise
par sa grande taille, souvent plus de 1 m, par ses jolies feuilles du plus
beau vert et par ses fleurs minuscules, réunies en petites boules. Il
a été introduit en Europe occidentale au temps de la croisade, et
c'est de l'arabe tharchoûm que dérive le mot estragon.
Je recommande ce végétal essentiellement comme apéritif et comme
ami de I'estomac. Il est capable de redonner le goût de manger aux
plus faibles, aux convalescents, aux névrosés, aux angoissés, aux neu-
rasthéniques. Il combat les mauvaises digestions, les ballonnements,
les aigreurs d’estomac, l’aérophagie et les fermentations intestinales.
De plus il se révèle diurétique (utile en cas de goutte, de rhumatismes,
de rétention d'urine, de paresse des reins et de la vessie). Son action
contre les rhumatismes, I'arthrose des vieillards est particulièrement
intéressante. Il est encore capable de régulariser le cycle des femmes.
Il est vermifuge. Et il calme la douleur, notamment les rages de
dents.
RÉCOLTE :
Vous ne trouverez guère d'estragon dans la nature.
Sinon à proximité de quelques jardins d’où il se sera échappé. Culti-
vez-le dins une bonne terre profonde : il se multiplie par rejets
de souche. Récoltez les branches au fur et à mesure de vos besoins.
L'EUCALYPTUS
C'est dans la vaste tribu des eucalyptus, originaires
de I'Australie et des îles avoisinantes, que l'on trouve les plus grands
arbres du monde - plus hauts même que les fameux séquoias de
Californie. On en connaît un exemplaire qui plafonnait à 165 m...
Les eucalyptus ont été introduits dans la région méditerranéenne
aux alentours de I'année 1860. Le plus commun de tous, I'eucalyptus
globuleux, y a gagné les deux charmants surnoms d'arbre à la fièvre
et de gommier bleu de Tasmanie. Il ne mesure guère, chez nous,
que 30 à 35 m, alors que dans son pays d'origine il passe fréquemment
la barre des 100 m. Chacun connaît ses feuilles en forme de petites
lances, bleuâtres, arquées, et toutes disposées dans un plan vertical,
de telle sorte qu'elles ne donnent aucune ombre. Chacun connaît
aussi ses étranges fleurs à I'allure d'ostensoirs, où la corolle en couvercle
se détache à I'instant de la floraison. Chacun, enfin, se rappelle l'odeur
caractéristique et entêtante de l'espèce...
De l'eucalyptus, on n'utilise en phytothérapie que les feuilles. Elles
sont antiseptiques, font tomber la fièvre, resserrent les vaisseaux
sanguins périphériques, et se montrent fort efficaces contre les
embarras des voies respiratoires. A l’intérieur, elles se révèlent par-
ticulièrement actives contre les fièvres intermittentes, l'asthme, les
bronchites, les angines, les yhumes, les encombrements de I'appareil
digestif et les ennuis urinaires. A l'extérieur, elles arrêtent les hémor-
ragies, soulagent le système nerveux, calment les migraines, guérissent
(mâchées) les gingivites et les maux de bouche. Enfin, elles peuvent
être employées en pansements, en lotions, en lavements, contre les
blessures, les écoulements d'oreilles, les infections nasales, les vaginites,
les blennorragies et les inflammations du rectum.
RECOLTE :
Il faut laisser sur l'arbre les feuilles trop jeunes, qui ne
se sont pas encore arquées et qui n'ont pas développé tout leur arôme.
Choisissez donc des feuilles bien formées, en été ou en automne;
faites-les sécher à I'ombre (bien étalées), et conservez-les à I'abri
de la lumière. Vous pouvez aussi les acheter dans les bonnes herbo-
risteries.
DECOCTION
pour l'usage externe (bains de pieds et de mains, bains de
siège, pansements, lotions, Iavements) : comptez une poignée de feuilles
entières ou une demï-poignée de feuilles concassées par litre d'eau.
FUMIGATIONS
(contre l'asthme, la bronchite, etc.) : 3 à 5 fumigations
(traitement d'attaque); réduisez à 2 au bout de quelques jours
NOTA :
I'eucalyptus, à doses excessives, peut devenir toxique.
Les proportions fournies ci-dessus sont sans danger. Cependant,quelques
personnes sont hypersensibles à la plante : ie leur recommande d'in'
terrompre tout traitement au moindre malaise (maux de tête consé-
cutifs à l'absorption, vertiges, etc.).
LE.FENOUIL
Le bon François Rabelais se permettait des plaisanteries
du goût le plus douteux sur le fenouil : il est vrai que la plante a des
vertus carminatives , c'est-à-dire qu'elle aide à la libération des
gaz intestinaux. Mais il s'agit à mes yeux d'une qualité! Au reste,
grâces soient rendues à Dame Nature d'avoir inventé ce grand cou-
sin de la carotte. Je ne rappellerai que pour mémoire I'usage que l'on
fait (comme légume) des grosses côtes de ses feuilles renflées à la
base. et l'inimitable saveur de ses graines, qu'on emploie pour assai-
sonner les viandes, le poisson, voire le fromage ou le pain... Le fenouil
commun. ou officinal. parfois baptisé aneth doux ou anis fenouil,
se différencie en plusieurs races (doux, amer ou d'Allemagne, de Flo-
rence, d'âne, etc.). I1 est originaire du bassin méditerranéen; puis,
largement cultivé, il s'est répandu dans le monde entier en s'échap-
pant des jardins. Il s'agit d'une herbe puissante, haute de 1 à 2 m,
à grands parasols de fleurs jaunes et à fruits en petits fuseaux d'un
centimètre de longueur.
Comme légume, le fenouil est extrêmement sain, digeste, apaisant
pour I'estomac et l'intestin, et doucement laxatif. Comme herbe
médicinale, je le recommande surtout aux femmes, dans quelque
état qu'elles se trouvent : aux unes il facilite le bon déroulement des
règles; aux autres, il fait venir le lait (on I'appelle galactogène); en
cataplasmes, tout particulièrement, il résout les engorgements des
seins, et maintient à ceux-ci leur galbe pendant toute la période de
l'allaitement. Certes, on a dit la plante susceptible de provoquer
des avortements, mais j'émets les plus grands doutes à ce sujet.
Le végétal a d'ailleurs plus d'une propriété cachée. Il est apéritif,
diurétique, stimulant, tonique, calmant, et fort efficace contre les
parasites de toutes sortes. Je me souviens d'un homme que la réten-
tion d'urine avait fortement affaibli, et qui, sur mes conseils, commença
uns cure énergique de fenouil : il se remit rapidement à uriner, à
la stupéfaction de son médecin ordinaire. Ma grand-mère Sophie,
quant à elle, préparait à merveille une infusion de graines de fenouil,
qu'elle déclarait à la fois vermifuge et propre à apporter le sommeil
aux enfants trop nerveux. L'espèce a encore le meilleur effet sur les
poumons et les bronches; elle calme les crises de toux, de coqueluche
et d'asthme; elle purge les organismes les plus encombrés. A I'ex-
térieur, on I'emploie en gargarismes contre les maux de gorge, en
applications contre les douleurs du ventre, et en collyre sur les yeux.
RÉCOLTE :
Le plus simple est évidemment de cultiver au jardin
I'une des multiples variétés de fenouil. Il vous faut pour cela un terrain
bien ensoleillé mais frais, et un sol calcaire. Semez en place en automne,
ou sous châssis au printemps (avec, dans ce cas, un repiquage en
juillet). Du fenouil, toute la plante est utilisable. Cueillez les fleurs
en boutons (faites-les sécher à I'ombre) aux alentours du mois de
juin; récoltez les feuilles et les graines juste avant la maturité de ces
dernières (septembre), et faites-les également sécher à I'ombre. Prenez
les racines à I'automne finissant.
PREPARATION ET EMPLOI :
INFUSION
tonique et calmante, facilite la digestion, combat l'aéro-
phagie et les troubles intestinaux : jetez deux pincëes de semences
dans une tasse d'eau, avec une pincée de semences d'anis et deux feuilles
de menthe. (3 tasses par jour.)
contre la toux : comptez une cuillerée à café de semences
et de feuilles concassées pour une tasse d'eau; sucrez abondamment
au miel. (3 tasses par jour.)
DÉCOCTION
de plante entière (diurétique) : jetez deux pincées de
plante par litre d'eau. (2 à 3 tasses par jour ; recommandée notamment
contre les inflammations des reins, elle possède aussi d'excellentes
vertus digestives.)
DECOCTION
pour l'usage externe (gargarismes, mantx de ventre) :
comptez une bonne poignée de racines, de feuilles et de semences par
litre d'eau.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
mêmes proportions que pour la décoction précëdente.
COLLYRE
contre les infections des yeux : Iaissez tremper une heure
une cuillerée de semences de fenouil dans 2 cuillerées d'alcool à 45 o
et 10 cuillerées d'eau distillée.
CATAPLASMES
de feuilles et de fleurs : contre les ecchymoses et
I'engorgement des seins.
INFUSIONS COMPLEXES
contre l'obésitë due à l'angoisse
fenouil, 2 pincées de marjolaine et 2 pincées de
d'eau, (Une tasse au coucher.)
pour < garder la ligne > : jetez 2 pincées de fenouil,
2 d'anis vert et 2 de serpolet dans un litre d'eau. (2 à 3 tasses par jour.)
LE FENUGREC
J'aime à découvrir ce modeste cousin du trèfle et de la
luzerne aux fleurs jaune pâle dans les garrigues et les rocailles : je
sais qu'il est signe de bonheur, car je l'utilise, avec la sarriette, la
berce et la chélidoine, dans mes philtres d'amour... Mais qu'on
n'aille pas croire que c'est là sa seule... vertu (!). Il était cultivé dans
l'Égypte des pharaons, et y servait aux cérémonies religieuses : j'ima-
gine que c'était pour de plus hautes raisons. Les Grecs le tenaient
en très grande estime, et si le très terre à terre Romain Caton I'Ancien
voulait le réserver au bétail, par contre les moines du Moyen Age
le plantaient pour combattre quantité de maux, des troubles du foie
et des reins jusqu'aux palpitations, en passant par I'empoisonnement
du sang, la baisse de la vue et les fièvres...
Il existe deux races de fenugrec (appelé aussi trigonelle, foin grec,
saine graine, graine joyeuse, senegrain, encore ou fénégré), I'une
sauvage, commune dans la partie sud de la France, et I'autre cultivée,
que I'on rencontre un peu partout, car I'espèce aime à s'échapper
des champs où on prétend I'enfermer. Toutes deux sont toniques,
reconstituantes et fortiflantes; mais elles n'agissent pas comme
des dopings : au contraire, elles sont également calmantes, et
c'est dans I'ordre qu'elles stimulent I'ensemble des fonctions organiques.
Le fenugrec redonne de l'appétit aux malades épuisés (les belles
Orientales I'utilisaient pour... acquérir des rondeurs); riche en éléments
indispensables (phosphore, fer, soufre, etc.), il alimente I'usine chi-
mique des cellules, repeuple le sang en globules rouges et recons-
titue les stocks d'énergie perdue. En outre, grâce à la substance
adoucissante (mucilage) dont il est largement pourvu, il < met de
I'huile > dans les rouages de I'organisme. Je ne le recommande pas
contre telle ou telle maladie particulière; mais j'en conseille la cure
dans toutes les maladies de faiblesse (anémie, apathie), et à tous les
stades des maladies infectieuses.
RÉCOLTE, :
Cueillez les fruits du fenugrec dans la campagne si
vous en avez le loisir; mais je crois bien plus simple d’en cultiver
un petit carré au jardin. Il aime les sols argileux et calcaires, et déteste
les excès d'eau. Plantez-le soit à I'automne, soit au printemps, et récol-
tez les gousses (un peu analogues à celles du petit pois ou du haricot)
lorsqu'elles sont bien mûres. Laissez-les sécher sur un plancher
propre, puis battez-les et recueillez-en les graines, qui forment la
partie active de la plante.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
GRAINES CONCASSÉES :
2 cuillerées à café par jour, avec du miel, du pain d’épice,
du chocolat, etc.
DECOCTION DE GRAINES :
jetez-en une poignée, après les avoir moulues grossiè-
rement, dans un litre d'eau; laissez sur le feu un bon quart d’heure.
(2 à 3 tasses par jour).
DECOCTION
pour l'usage externe (en lavements, Iotions, etc.)
jetez 2 poignées de graines moulues dans un litre d'eau.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
mêmes proportions que pour la décoction précédente.
NOTA :
Les graines sèches de fenugrec dégagent un arôme puis-
sant (capable d'éloigner les mites, les punaises, et les charançons),
que certains jugent délicieux et d'autres exécrable. si vous vous rangez
dans celte dernière catégorie, désodorisez vos semences en les
jetant deux minutes dans de I'alcool bouillant, puis en les séchant
rapidement dans un linge.
si vous utilisez les graines de fenugrec uniquement en usage interne,
je vous conseille de ne pas prolonger votre cure au delà d'une semaine,
puis de la reprendre après huit jours d'interruption, etc., car la plante
contient un principe actif, nommé trigonelline, qui pourrait devenir
dangereux à la longue.
LES FOUGERES
Plantes mystérieuses, plantes étranges que les fougères!
Plantes magiques aussi, qui font irrésistiblement songer à ces immenses
forêts maléfiques des premiers âges de la Terre...
Les fougères sont des végétaux sans fleurs, à deux générations bien
distinctes : la première produit, sur une sorte de film végétal plus
petit qu'un timbre-poste, des cellules sexuelles mâles et femelles;
elle est extrêmement discrète; la seconde donne les grandes frondes
triangulaires, découpées comme des plumes d'oiseau, que chacun
connaît.
Il existe à travers le monde des dizaines d'espèces différentes de fou-
gères. Quatre au moins sont utilisées en phytothérapie : l'osmonde
royale, la fougère mâle, la fougère femelle et le polypode vulgaire.
L'osmonde royale, ou fougère royale, ou fougère fleurie, ou fougère
aquatique, ou encore herbe de saint Christophe, est incontestablement
la plus élégante de toutes les fougères d'Europe. Elle atteint aisément
1,50 à 1,80 m de hauteur. Elle se plaît à fréquenter les bois humides
et marécageux (en France, dans les Vosges, l'Ouest et le Sud-Ouest).
Ses vastes feuilles offrent aux regards des lobes non dentés, et, contrai-
rement à la plupart de ses cousines, elle ne porte pas ses amas de spores
sur son dos : ceux-ci sont groupés en épis roussâtres dans sa partie
supérieure.
L'osmonde royale est purgative, diurétique, tonique et propre à
arrêter les saignements. C'est sa racine (en vérité I'ensemble de ses
racines et de sa tige souterraine ou rhizome) qu'il convient d'employer
dans les cas d'embarras du sang, de rétention d'urine, de calculs
urinaires, de cellulite, de goutte, de rhumatismes, de faiblesse générale,
et en pansements contre les blessures superficielles.
RÉCOLTE :
Extrayez du sol la racine de l'osmonde en automne,
quand elle s'est chargée au maximum de substances nutritives et
actives pour passer I'hiver. FaitesJa sécher à I'ombre : elle se conserve
fort bien.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION ET DÉCOCTION :
jetez l0 pincées de racine râpée par litre d'eau. (2 à
3 tasses par jour.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
comptez 20 pincëes de racine râpée par litre d'eau.
DECOCTION
pour pansements : hâchez 20 à 30 pincées de racine dans
un litre d'eau.
LIT D'OSMONDE :
mon père recommandait, pour soulager les enfants
rachitiques et les rhumatisants, de leur confectionner chaque soir
un lit d'osmonde royale fraîche ; la recette est aussi efficace que simple.
La fougère mâle a été ainsi baptisée non pas parce que l'espèce ne
compte que des pieds mâles, mais parce que sa souche est extraordinaire-
ment puissante. Elle croît dans la plupart des forêts du monde, avec
une nette prédilection pour les bois de hêtres au sol riche et orientés
au nord. Sa grande feuille de 0,50 à 1,50 m de hauteur, se distingue
par son axe épais et garni d'écailles rousses à la base, par ses branches
deux fois divisées, et par ses amas de spores (au dos) en forme de
reins.
Les anciens médecins grecs - Théophraste, Dioscoride, Galien -
recommandaient déjà l'espèce contre les parasites intestinaux (racine +
miel contre les vers solitaires; racine + vin + orge contre les vers
ronds). On lui a ensuite attribué des propriétés diverses, certaines
partiellement fondées (elle est capable d'arrêter le sang et de cica-
triser les plaies; elle peut provoquer des avortements), d'autres
parfaitement fantaisistes (cueillie dans la nuit de la Saint-Jean, elle
était réputée apte à rendre invisible!).
J'ai surtout utilisé les qualités vermifuges des parties souterraines de
la plante (les jeunes feuilles printanières, joliment enroulées en crosses,
sont également actives), et les propriétés calmantes de ses feuilles
entières (en bains de mains et de pieds, contre les rhumatismes, la
goutte, la sciatique. les lumbagos, les crampes, etc.). Mais je mets en
garde le lecteur contre I'abus de ces drogues : à doses massives, la
fougère mâle est très capable de provoquer la cécité.
RÉCOLTE :
Cueillez les feuilles de fougère mâle au printemps,
quand elles sont encore très jeunes, enroulées en crosses ou à peine
déroulées. (En Norvège et en Suède, on les mange comme des asperges.)
Extirpez la racine (le rhizome) à l'automne.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION
jetez l0 à 20 petites tranches de racine dans un litre d'eau.
(Une tasse le matin à jeun, comme vermifuge. Pour les enfants, ne
dépassez pas 10 tranches par litre. )
PULPE AU MIEL
de racine (vermifuge) : pour les enfants, la valeur de
2 cuillerées à café par jour, le matin, à jeun, miel à volonté. Pour les
adultes, la valeur de 4 cuillerées à soupe de pulpe.
INFUSION ET DÉCOCTION
de jeunes feuilles ( calmantes et vermifuges ) : jetez
un petit bouquet de crosses fraîches dans un litre d'eau. (Une petite
tasse par jour pour les enfants.2 à 3 tasses pour les adultes.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
comptez 10 tranches de racine et un petit bouquet de
jeunes feuilles par litre d'esu.
LIT DE FOUGÈRE MÂLE :
pour les rachitiques et les rhumatisants.
Si la fougère mâle n'a pas que des pieds mâles, la fougère femelle
n'a pas que des pieds femelles! En vérité, cette dernière est ainsi
nommée parce qu'elle est plus gracile, plus légère, moins rustaude
que sa cousine. Elle s'en distingue par sa taille inférieure (rarement
plus de 1 m), par ses axes lisses, par la dentelure de ses lobes foliaires,
et par ses amas de spores réunis en demi-lunes. Elle hante toutes
les forêts de I'hémisphère boréal.
La fougère femelle possède à peu près les mêmes propriétés que la
fougère mâle, mais plus discrètes, plus atténuées. Elle agit en dou-
ceur où l'autre intervient en force. C'est pourquoi, finalement,
je la préfère. Les conditions de récolte, de préparation et d'emploi
sont analogues : il serait fastidieux que je me répète.
Le polypode vulgaire, encore baptisé polypode des bois, réglisse
sauvage, réglisse des bois, herbe de gagne, fougère-réglisse ou mille-
pieds, est extrêmement répandu sur les vieux murs, au pied des arbres,
dans les rocailles, etc. Ses feuilles de 20 à 50 cm de longueur, d’abord
enroulées en crosses au printemps, sont une seule fois divisées en lobes
de dimensions décroissantes à mesure qu'on se rapproche de l'extré-
mité. Elles portent sur leur face dorsale de nombreux amas de spores
arrondis (deux rangs parallèles sur chaque lobe). Le gros rhizome
de I'espèce (sa racine) possède une saveur sucrée caractéristique,
un goût de réglisse prononcé (d'où les noms vulgaires de réglisse des
bois, etc.).
Le polypode, que les Anciens connaissaient à merveille, se révèle
un excellent purgatif et un laxatif efficace. Il calme la toux, améliore
notablement le pronostic des bronchites chroniques ou aiguës, et
vient assez facilement à bout des rhumes les plus tenaces. Il élimine
les vers intestinaux, guérit nombre d'affections du foie et de la rate,
excite la sécrétion biliaire, et soulage les goutteux et les rhumatisants.
RECOLTE :
Vous n'utiliserez que la racine du polypode, que vous
déterrerez en juillet-août, et que vous ferez sécher au soleil ou à I'ombre.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
DÉCOCTION :
pour un litre d'eau, pilez 30 à 40 pincées de racine sèche.
(Une tasse le matin, à jeun.) Vous pouvez aussi, lorsque votre décoc-
tion est prête, y ajouter une cuillerée à cafë de réglisse en poudre et
un petit fragment de racine d'angélique archangélique; dans ce cas,
laissez reposer une demi-journée; passez et sucrez au miel. (Une tasse
le matin, à jeun.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
une poignée de racine pilëe de polypode par litre d'eau.
NOTA :
Avant de quitter définitivement les fougères, je ne saurais trop vous
redire de n'user de la fougère mâle qu'avec beaucoup de précautions -
car elle est nettement toxique sitôt qu'on dépasse les doses. Le mieux
serait encore de ne pas I'utiliser en dehors des cas graves, et de réserver
Ia .fougère femelle à tous les autres.
LE FRAISIER
Je ne parlerai pas ici de la fraise de culture, sélection-
née, aseptisée, manipulée, dénaturée, gorgée d'engrais chimiques et
toute dégoulinante d'insecticides, qu'on peut importer du Cap en
hiver, et qui n'a plus, en fait de goût, qu'une vague saveur sucrée...
Seule I'adorable, la délicieuse, l'élégante fraise des bois m'intéresse;
c'est la parure vermillon des buissons d'ombre verte; c'est la larme
de sang pur des coteaux et des forêts enchantés au joli mai frémissant.
Quoi de plus ravissant que ses feuilles à trois lobes du vert le plus ten-
dre ? que ses fleurs de rosacées à 5 sépales et à 5 pétales immaculés,
avec un buisson d'étamines d'or au centre? que ses fruits (ses faux
fruits, en vérité, les vrais étant constitués par les < graines > superfi-
cielles de la fraise) rouges comme les lèvres des jeunes filles? Le frai-
sier, sous ses airs modestes, se multiplie activement, non seulement
par ses graines, mais encore végétativement, à coups de stolons, tiges
qui partent d'un pied, s'enracinent à quelque distance, et donnent
bientôt une nouvelle plante. L'espèce, de la sorte, a très ingénument
colonisé la Terre...
Le fraisier sauvage, dit encore capron, caperonnier, majaufe ou bres-
lingue, était à l'évidence déjà connu de nos ancêtres des cités lacustres
(en témoignent de nombreuses graines fossiles). Les Anciens I'esti-
maient, du médecin grec Théophraste aux poètes latins Ovide et Vir-
gile. Au Moyen Age, la plante était considérée comme magique, et
c'est seulement au XVIe siècle que les médecins ont recommencé de
s'y intéresser de près. Ils l'ont dite alors propre à guérir les plaies et
les ulcères, les coliques, la dysenterie, les maladies de la rate, les inflam-
mations du foie, les infections des reins et de la vessie, enfin les affec-
tions de la bouche et les dents branlantes. Le grand botaniste suédois
Linné lui-même, un peu plus tard, jurait s'être soigné de la goutte par
une véritable débauche de fraises, et l'écrivain français Fontenelle,
qui mourut centenaire, leur attribuait sa verdeur... Madame Tallien,
quant à elle, s'en servait pour préparer ses bains de beauté : la recette
n'a pas été perdue; je connais une femme merveilleuse qui entretient
la fraîcheur de son teint par la seule application de rondelles de
fraises des bois.
Rien n'est plus agréable que de boire un thé de fraises, confectionné
avec les feuilles et les racines de la plante. Rien n'est plus utile aussi,
car le breuvage est très propre à purger le sang, à stimuler tous les
organes et à calmer les nerfs. (L'infusion de racines donne une couleur
rougeâtre aux urines, mais elle est absolument sans danger.) A I'aide
des feuilles pilées du végétal, on fabrique des cataplasmes fort effica-
ces contre les ulcères et les plaies infectées. La décoction de feuilles
et de racines sert en bains de mains et de pieds ou en lavements contre
les diarrhées, en lotion contre les mauvaises gerçures, et en garga-
rismes contre les maux de gorge.
La fraise en elle-même - le fruit rouge et délicieux de cette espèce
que les dieux ont bénie -, est fort nutritive, apéritive, rafraîchissante,
purgative et calmante. J'en recommande la cure intensive à tous ceux
qui souffrent de paresse intestinale, aux malades du foie, aux gout-
teux, aux rhumatisants, aux nerveux, aux anémiques et à tous les
convalescents (car elle est reminéralisante, grâce à son fer, à son phos-
phore, à son calcium, à son brome, etc.). Son suc frais, appliqué sur
la peau, nettoie, entretient et embellit cent fois mieux cette dernière
que toutes les lotions chimiques (dangereuses) qu'une certaine
cité impose aux femmes.
La fraise n'a qu'un inconvénient : certains sujets sensibles, après en
avoir absorbé une certaine quantité, réagissent en développant une
forte crise d'urticaire. Ceux-là devront évidemment s'abstenir d'y
avoir recours - encore que j'aie vu infiniment plus de crises d'urti-
caire imputables à des fraises < industrielles > qu'à des fraises sauva-
ges... D'ailleurs, il n'est pas sûr que la fraise soit la cause d'allergies
véritables : j'aurais tendance à penser que les boutons et les rougeurs,
lorsqu'ils apparaissent, sont le signe de l'expulsion brutale des toxi-
nes contenues dans le corps - expulsion due à I'effet purgatif des
délicieux fruits rouges.
RÉCOLTE :
Cueillez les fraises des bois quand elles sont bien mûres :
la saison dépend en vérité du lieu où vous vous trouvez (dès avril en
Provence, jusqu'en août à 1500 m d'altitude dans les Alpes)... N'ou-
bliez pas de rapporter de votre promenade une provision de racines
et de feuilles du végétal. Quant à la fraise de culture, au jardin, elle
fera vos délices... et votre santé, à condition que vous l'entreteniez sans
insecticides ni engrais chimiques.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION
de racines et de feuilles : comptez une poignëe de plante
fraîche ou sèche par litre d’eau. (A volonté.)
THE
de racines et de feuilles : procédez comme pour un thé
normal, après avoir soigneusement lavé les racines. (A volonté.)
DÉCOCTION
de racines et de feuilles (usage externe : lotions, bains de
mains et de pieds, gargarismes, etc.) : comptez une poignée et demie de
plante par litre d'eau.
DENTIFRICE
de fraises : rëduisez en poudre une poignée de feuilles
et de racines de fraisier, et mêlez-les à de Ia craie également pulvérisée ;
frottez vos dents et vos gencives à la brosse, à sec, et rincez. Je vous cer-
tifie que vos gencives se renforceront, et que I'émail de vos dents sera
bien moins attaquë que par n'importe quel dentifrice du commerce.
LAIT DE BEAUTÉ
à la fraise : recueillez Ie suc frais des fruits mûrs, et
mélangez-le à un peu de lait ; Iaissez prusieurs heures, voire toute Ia
nuit sur le visage, ayant de rincer à l’eau de rose.
LE FRAMBOISIER
Lorsque j'étais enfant, j'allais chaque été cueillir les
belles framboises rouges dans les taillis : j'en revenais griffé d’épines,
la culotte en loques, mais heureux comme un prince... que de douceur,
dans ces fruits étranges, petits amoncellements de grains vermillons
ou écarlates sur une coupelle vert tendre... Je m'en serais volontiers
rempli l'estomac jusqu'aux yeux - et je m'en serais parfaitement
trouvé. car la nature, en quelques occasions, paraît avoir voulu réu-
nir toutes les vertus dans une même plante un déIice pour la langue,
et une merveille végétale pour la santé du corps!
Chacun connaît les tiges dressées et un peu piquantes du framboisier,
ses feuilles composées blanchâtres en dessous, ses fleurs blanches à
5 pétales et ses fruits délectables qui ressemblent par la forme à ceux
de la ronce. On I'appelle encore ronce du mont Ida.
La framboise, outre qu'elle constitue un dessert exquis (telle quelle,
ou avec du sucre, ou en confitures, etc.), fournit également un sirop
rafraîchissant. Je la recommande aux diabétiques, à ceux qui souffrent
d'aigreurs d'estomac, aux rhumatisants, aux constipés et aux sujets
atteints d'albuminurie. Elle est également I'amie du foie, et elle exerce
la meilleure action contre les fièvres, les angines, les bronchites, les
infections du système urinaire et les inflammations de la bouche. Les
fleurs et les feuilles de I'espèce ont les mêmes propriétés : elles présen-
tent I'avantage, sur les fruits, de se conserver parfaitement une fois
séchées, et donc decompter au rang des < toujours présents > de votre
petite pharmacie naturelle.
RÉCOLTE :
Cueillez les fleurs et les feuilles du framboisier juste
avant l'épanouissement des premières, et faites-les sécher en les éta-
lant à l'ombre. Allez ramasser les framboises quand elles sont bien
mûres. Le framboisier est surtout abondant en montagne, à partir
de 500-600 m. Il peuple les clairières, I'orée des forêts et le bord des
chemins. Si vous voulez planter des framboisiers au jardin, rien de
plus facile : disposez-les dans un coin au sol plutôt sec et acide; I'es-
pèce se reproduit parfaitement sur le mode végétatif, en émettant des
drageons au printemps, et a même tendance à devenir envahissante.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION OU DÉCOCTION
de fleurs : jetez une demi-poignëe de fleurs fraîches ou
sèches dans un litre d'eau. (3 ou 4 tasses par jour.)
de feuilles : jetez une poignée de feuilles fraîches ou sèches
dans un litre d'eau. (2 tasses par jour.)
DÉCOCTION CONCENTRÉE
de feuilles (usage externe : gargarismes, lotions)
jetez 2 poignées de feuilles par litre d'eau
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
jetez une poignée de fleurs et une poignée de feuilles par litre d’eau
LE FRÊNE
Les feuilles de frêne sont l’un des aliments préférés des
chèvres, et j'ai tendance à faire confrance à ces animaux rusés dès
qu'il s'agit de choisir ce qui est bon pour I'organisme... Au reste, mon
expérience de phytothérapeute m'a appris que ce bel arbre de toutes
les campagnes, au bois dur comme du fer, recèle plus d'une vertu.
Peu de gens s'en doutent, mais le frêne est un cousin de I'olivier, du
lilas et du troène (famille des oléacées). Il en existe plusieurs espèces,
la plus commune étant le frêne élevé, ou grand frêne, ou frêne à feuil-
les aiguës. Il atteint exceptionnellement 35 à 40 m de hauteur, mais
beaucoup plus souvent 10 m. Il se distingue par ses feuilles composées
à nombre impair de folioles (généralement 9 ou l l), par ses petites
fleurs rougeâtres sans calice ni corolle, et par ses grappes pendantes
de fruits ailés (samares) qui volent au vent d'automnà. on le trouve
sur tous les sols, mais uniquement en Europe. Les abeilles le dédaignent,
car il ne leur fournit aucun nectar : c'est encore le vent qui se charge
de répandre au loin le pollen de 1'espèce.
Selon la mythologie nordique, le monde entier est abrité par le gigan-
tesque frêne Yggdrasil, et c'est sous ses rameaux bienfaisants que les
dieux tiennent conseil... Les peuples celtiques et ceux du bassin médi-
terranéen ont également déifié ce végétal, mais il tient moins de place
dans leur conception du monde que le chêne ou l'olivier.
Du point de vue médicinal, le frêne a été très tôt utilisé. Le médecin
grec Dioscoride le recommandait contre les morsures de serpents;
au Moyen Age, sainte Hildegarde le donnait contre la goutte, et au
XVIe siècle, I'Italien Matthiole le conseillait contre les maux de dents
et la surdité. Ses feuilles et ses fruits sont aujourd'hui considérés comme
diurétiques, et notamment comme spécifiques de la goutte et des rhu-
matismes. Son écorce est tonique, propre à faire tomber la fièvre et
propre à resserrer les vaisseaux périphériques. Je me souviens fort bien
avoir guéri en quelques mois un goutteux grabataire en lui faisant
suivre une cure de feuilles de frêne, et l'un de mes autres patients,
perclus de rhumatismes, dut à la même cure de pouvoir à nouveau
marcher et travailler normalement... L'écorce de I'arbre doit à ses
propriétés astringentes de calmer les diarrhées et les dysenteries
rebelles, et d'arrêter les hémorragies. Ses qualités d'< anti-fièvre > la
font recommander dans tous les cas d'infections (par des virus ou des
bactéries), avec forte poussée thermométrique (mon père ne me
parlait jamais du frêne que comme quinquina d'Europe ! ).
RÉCOLTE :
Cueillez les feuilles du frêne à la fin du printemps ou au
début de l'été, lorsqu'elles sont comme enduites d'une mince pelli-
cule visqueuse et légèrement sucrée; détachez les folioles de l'axe
commun; faites-les sécher à l'ombre, bien étalées. Les fruits se récol-
tent jeunes, bien verts. L'écorce la meilleure provient des rameaux de
trois ou quatre ans : détachez-la au printemps, à la montée de la
sève, et séchezla au soleil après I'avoir taillée en pièces de la grosseur
d'un timbre-poste.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION OU DÉCOCTION
de feuilles : jetez une petite poignëe de feuilles sèches
dans un litre d'eau. (4 à 5 tasses par jour, comme diurétique et laxatif.)
d'écorce (fébrifuge, antidiarrhéique et anti-hëmorragi-
que) : comptez une poignée de végétal par litre d'eau. (Une tasse avant
Ies deux principaux repas.)
DÉCOCTION CONCENTRÉE
contre la goutte : jetez une bonne poignée de feuiiles
sèches dans 1/2 litre d'eau. (Une tasse toutes les 2 ou 3 heures.)
BAJNS DE MAINS ET DE PIEDS
contre la goutte et les rhumatismes : comptez une bonne
poignée de feuilles sèches par litre d'eau. (3 bains par jour.)
LAVEMENTS
contre la goutte : mêmes proportions que pour la décoc-
tion concentrée. (2 lavements par jour.)
POUDRE
de feuilles, contre la goutte : prenez-en une pincée, infu-
sée pendant une heure ou deux dans une tasse d'eau très chaude. (En
cas de crise aiguë.)
DECOCTION
de semences (diurétique, laxative, antirhumatismale) :
comptez l0 pincées de graines par litre d'eau; laissez 3 minutes à feu
vif, puis l14 d'heure àfeu très doux. (3 à 4 tasses par jour.)
POUDRE
de semences contre I'arthrose des vieillards : 4 pincëes
dans une tasse de tisane douce, un jour sur deux.
POUDRE
d'écorce (fébrifuge) : administrez-en 4 pincées, trois
fois par jour, pendant trois jours.
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS
d'écorce : comptez deux poignées de végétal concassé
par litre d'eau. (2 bains par jour, contre les diarrhées.)
LIT
de feuilles de frêne : fort efficace pour accélérer le traite-
ment des crises de goutte et de rhumatismes ; mélangez au frêne des
feuilles de fougère : Ie résultat n'en sera que meilleur.
LA FUMETERRE
Son étrange nom lui vient de ce que son jus fait pleu-
rer les yeux comme la fumée (Olivier de Serres). D'autres disent que
ses fleurs roses ou rouges et ses feuilles gris argent, qui viennent
en gros massifs indécis, font songer à quelque fumée d'incendie dans
la plaine... La fumeterre est encore baptisée sel de terre, fleur de terre,
pisse-sang, herbe à la jaunisse, pied de géline, chausse rouge ou lait
battu. C'est une grande plante annuelle ou bisannuelle, qui orne les
champs, les décombres et les vieux murs de ses feuilles plusieurs fois
redivisées et de ses fleurs un peu pareilles à des pieds de chaussettes
(avec un éperon à I'arrière), dotées de 4 pétales. L'espèce, partie des
contrées tempérées de l'Ancien Monde, a désormais colonisé le globe...
Les Grecs Galien et Dioscoride recommandaient la fumeterre contre
les affections du foie, et d'abord contre la jaunisse. Au XVIe siècle,
l'Italien Matthiole y voyait un purgatif et un fortifiant général des
organes de I'abdomen. J'ai expérimenté, pour me part, les qualités
hépatiques de I'espèce, non seulement contre la jaunisse, mais encore
contre tous les troubles nés du mauvais fonctionnement du foie (diges-
tions difficiles, renvois bilieux, dartres, maladies chroniques de Ia
peau). Je me souviens en particulier d'un homme qui souffrait de dar-
tres très disgracieuses, et qu'un traitement d'attaque au suc et à l'infu-
sion de fumeterre guérit en un mois. A d'autres, je donnais surtout la
plante comme calmant, et j'en recommandais une cure dépurative
annuelle.
RECOLTE :
Cueillez la fumeterre de la fin du printemps à I'automne,
en choisissant les plus beaux plants du massif - les plus feuillus et les
plus superbement garnis de fleurs. Toute la plante est utilisable. Fai-
tes-la sécher sur un drap ou en petits bouquets pendus au plafond.
PRÉPARATION ET EMPLOI :
INFUSION OU DÉCOCTION,
comme tonique et dépuratif, notamment en cure annuelle
d'été : comptez une demi-poignée de plante fraîche ou une bonne poi-
gnée de plante sèche par litre d'eau. (Une tasse un jour sur deux en
temps ordinaire. Une tasse avant chaque repas, pendant I jours, pour la
cure d'été.)
MACÉRATION :
Iaissez reposer une petite branche de fumeterre pendant
24 heures dans un verre de vin, de cidre, etc. ; fltrez . ( Un verre par jour. )
SUC FRAIS :
5 à 6 cuillerées à soupe par jour, dans du miel ou du lait.
(Contre les affections du foie.)
BAINS DE MAINS ET DE PIEDS :
comptez une bonne poignée de plante fraîche ou 3 à 4
poignées de plante sèche par litre d'eau. (Un bain par jour, comme cal-
mant, dépuratif, et contre les matadies de.foie.)
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