Spiritualité des Andes

Je vous conseille de lire plusieurs textes pour bien comprendre la sagesse andine.


- Le Retour de l'homme rouge et Les marcheurs de l'arc-en-ciel de Atawallpa Makarios Oviedo Freire;

 


- El vuelo del aguila y el condor; de Patricia Noriega Riveira;


- The Shamanic Teachings of don Alberto Taxo; de Shirley Blancke, et Hank Wesselman ;


Et Enfin ce document très riche:


- Lo que la espiritualidad del sendero del yachak nos está enseñando ;de Patricio Guerrero Arias.


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Le musicien kichwa-aymara Nestor Karal nous dit que la spiritualité est la vibration de l'esprit (espiritu) du cosmos, qui est dans tout ce qui vit;  ainsi tout est vivant, pas seulement les personnes mais aussi les animaux, les plantes, les pierres ce qui pour la raison occidentale sont des choses inertes... tout possède un esprit, donc de l'énergie, de la vibration.
La spiritualité rend possible l'équilibre de l'énergie parce que tout être, tout objet possède de l'énergie.
La spiritualité permet d'avoir une vision globale de la réalité, contrairement à la science  qui dans sa prétention de vérité a échoué et ne décrit qu'une moitié de la réalité, celle qui est mesurable et fractionnée laissant de côté la dimension spirituelle, celle des forces invisibles qui donnent un sens à la vie.
L'amour, la joie, l'espoir ont été écartés parce qu'ils ne peuvent être mesurés et pesés et surtout parce qu'ils ne génèrent pas de rentabilité.
La science n'ouvre pas de possibilités pour leur rencontre.
La spiritualité n'est pas en contradiction avec la science,  elle la complète et permet d'approcher de la vérité complète du grand mystère qu'est notre existence.
La notion cosmique de l'existence que permet la spiritualité rend l'être humain non séparé des autres êtres qui forment partie du cosmos, il intègre l'homme dans une trame d'altérité cosmique, une interrelation, une complémentarité avec tous les êtres de la communauté où palpite la vie, avec les animaux et le monde matériel, végétal et minéral qui peuple la Nature.
Pour la sagesse andine, la notion d'esprit, de Nuna Aya ou Ajayu, est un principe primordial de la vie communautaire.
Cela permet aussi de prendre conscience de la fragilité de la planète, de la douleur et agonie de la Terre Mère, cela permet encore, d'interroger la voie prise par notre existence et de comment les êtres humains peuvent influer le destin du monde et de la vie.
La spiritualité n'est pas uniquement reliée à une religion organisée, ni à une vision animiste de la nature comme le soutiens l'anthropologie coloniale.
La spiritualité ne peut se limiter uniquement à l'humanité ou à la relation de l'homme avec les divinités.
Toute la nature et l'ordre naturel participent à la sagesse des yachaks.
Ricardo Taco expliquait que son grand-père l'invitait à jouer avec les plantes, les animaux, l'eau, le soleil, son ombre (sombra), de jouer avec tout ce qui vibre, qui possède la vie,  honorer la terre qui nous donne de quoi nous nourrir comme une mère.
les plantes possèdent des sentiments, elles ont un esprit, certaines plantes permettent de nous revitaliser, de purifier le niveau spirituel.
La spiritualité n'est pas chercher un paradis lointain, comme le Nirvana réservé au illuminés, aux moines dans les hautes montagnes ou dans les temples obscures ou il faut meurtrir le corps et l'âme, ni dans las grottes .
La spiritualité n'est pas accédée seulement au moyen d'une posture de lotus ou une cérémonie d'ayahuasca, de san pedro ou de livres de développement personnel.
La spiritualité se rencontre dans la vie quotidienne, elle n'a rien à voir avec la souffrance mais plutôt avec la joie et la célébration de la vie.
La religion invite aux flagelations, à la négation du corps, au retrait social; elle a une compréhension négative qui prétend que le monde doit être transformé et requiert la force de l'esprit pour se libérer.
Mais la spiritualité permet d'avoir une attitude d'amour et de respect pour tout ce qui existe .
La spiritualité nourrie le coeur, l'être.
Tout ceci c'est ce qu'explique Carlos Yamberla.
Parler de spiritualité n'est pas une question de New Age qui est en accord avec le marché global qui génère une grande rentabilité, c'ette pratqiue est  dépolitisée, narcissique car elle renvoit tout le temps à soi et n'interroge pas sur la domination et l'injustice.
L'utopie de renaître dans une nouvelle terre, avec une humanité distincte ne doit pas conduire à une contemplation du monde mais aussi à une spiritualisation de la politique.
C'est ce qu'exprime Naupani Puma.
La spiritualité permet de combattre la colonisation de l'être, celle qui prive la condittion d'humanité, qui détruit la dignité, l'Etre.
La spiritualité n'est pas non plus une conception érotique de la Vie car c'est une passion pour la vie et le monde, passion qui transforme notre vie.
La spiritualité est un acte politique d'insurrection, de rupture avec les strurctures établies, avec notre vision du monde réductive.
C'est abandonner les zones sécurisantes comme l'exprime Manuel Gomez.
Pour pouvoir renaître cela passe par une profonde douleur.
Les pensées sans sentiments ou émotions  ne sont pas spirituelles.
Nely Guevara explique que la spiritualité aide à récupérer le sentier féminin, à équilibrer ce pouvoir avec celui du masculin ou pour mieux le dire à donner au masculin un sentier féminin.
Le masculin a abandonné le féminin pour pouvoir dominer, pour être un mâle qui raisonne et exclue alors que tout est en équilibre.

La voie des yachaks est la voie du coeur selon Alfano (2003), sentier qui conduit à la sagesse et la spiritualité vivante et qui a résisté à la colonisation imposée.
Pour comprendre cette voie il faut sentir et non uniquement  penser car ce n'est pas une vision seulement rationnaliste et académique mais une voie symbolique qui nous permet d'aller au-delà du perceptible.
La voie du coeur unifie la raison et le sentir ce qui permet de comprendre la notion de Runa, être une partie de la nature vivante qui est une énergie fluide, sans interruption.
A travers le monde matériel il existe aussi un univers spirituel qui se manifeste en différentes formes et sentir.
Ce sont ces connexions et réciprocités énergétiques qui forment le cosmos. C'est ce qu'enseigne le yachak Yambar (dans Parisi; 2000).
La voie du yachak n'est pas loin des problèmes quotidiens, elle leur donnent par contre une vision différente qui leur donnent du sens.
Le yachak ne se croit pas créateur, il est un simple cultivateur, il entretient, sème et réveille la spiritualité par son existence même.
Nicolasa Toctaguano exprime cela très bien, il faut semer, entretenir et cultiver la spiritualité en nous comme une plante.
Les Qeros admettent aussi cette comparaison entre la  spiritualité et la plante qui a besoin d'amour pour croître.
Les chamans d'Amazonie nourrissent les esprits qu'ils ont reliés à leur corps, qu'ils ont intégrés.


La spiritualité est le savoir qui organise le cosmos.
C'est pourquoi le yachak doit avoir un coeur pur comme le dit Maria Sandovalin.
Cette capacité née dans le ventre de la mère, dès la gestation. C'est ce que pense Francisco Quilimba (2009). C'est héréditaire.
Les esprits de la nature se perçoivent dans les rêves et sont des protecteurs. Ils se présentent aussi au moyen de signaux comme un rayon de soleil, l'arc-en-ciel, une maladie ou la mort qui montrent ainsi le chemin qu'il faut suivre comme l'explique Maria Chiluiza.
La vie quotidienne enseigne au yachak comment vivre et lire les signaux naturels de la Pacha Mama (Cachiguango; 2008).
Pour Nely Guevara l'enseignement se passe de l'intérieur et non seulement avec les livres.
Ecouter les arbres, différencier les sons des oiseaux, regarder les fleurs, permet d'apprendre à soigner.
il est nécessaire de rencontrer le silence de son être, son autre partie, qui est sacrée.
Les yachaks savent que le monde est une réserve d'énergie, de pouvoir et il est donc nécessaire d'être impécable.
La force et l'énergie (jinchi) sont indispensables por invoquer le pouvoir guérisseur des esprits et soigner la mauvaise énergie (chiki), l'énergie lourde, dense qui provoque les maladies, et qui doit se libérée, être purifiée, saine (Rodriguez; 1992).
Dans la cosmo-existence de la voie du yachak, nous parlons des saywas, ou des piliers, des collines d'énergie, qui sont des marqueurs cosmiques énergétiques qui guident le transit par la spirale de la vie et la roue médicinale des quatre vents, puisqu'il est supposé que dans le cosmos, le Pacha, tout est pluridiversité d'énergies, en flux infinis et reflux énergétiques qui se recréent cycliquement ; contrairement au modèle linéaire occidental qui parle d'un UNI-vers fixe, stable et ordonné qui fonctionne comme une machine.
Notre Pacha est un cosmos conscient dans lequel rien n'est calme, au contraire tout est continuellement en holo-mouvement ; c'est la matrice primordiale de la vie qui soutient toute existence et où tout est relié et palpite.
Cette multidimentionnalité de Pacha en fait une grande toile cosmique à partir de laquelle se tisse et se trame le Kawsay, la Vie.
Le Chaos est l'énergie qui engendre la Vie et l'équilibre statique provoque la mort, qui est une autre façon de nommer le Kawsay qui est une spirale infinie de transformations, de gestations, de germinations puis de morts et de renaissances, comme l'enseigne Sairy Lligado.
La Vie, Kawsay, est la supreme Saywa, le pilier cosmique qui donne un mouvement aux autres, c'est une danse permanente avec différents mouvements et différents niveaux vibratoires de densité et d'énergie, la même qui se présente en différents dimensions existantes.
Cette énergie suprême se tisse dans l'ordre cosmique, c'est une énergie primordiale constitutive qui se crée soi-même et dans laquelle la suprême unité germe et contient la dualité de la vie.
Alonso explique que tout ce qui existe contient la dualité, et aussi l'unité c'est-à-dire sa partie féminine et sa partie masculine. Chaque partie complémentaire et unifiée contient sa propre dualité.
Ce Jeu sacré entre l'unité, la parité et la diversité forme le mystérieux et paradoxal ordre de Pacha.
Seul le sentiment, la sagesse du coeur, permet d'atteindre cette profondeur de compréhension.
Alonso del Rio déclare que préssentir la dimention unitive absolue, l'unité de tout ce qui existe et y inclure ce qui pourrait exister est possible seulement a travers le sentiment.
La "mente" ne sert pas à comprendre cela, elle n'est pas suffisante pour imaginer l'unité.
C'est pour cela que c'est un Mystère, la cause sans cause.
Le Kawsay unifie le temps, l'espace et ce qui les relit; temps qui est en spirale et qui se transforme en fonction de l'espace.
L'Etre, le Runa, a pour mission de transiter et de jouer un rôle dans le méga-corps qu'est la Pacha-Mama.
Le Cosmos est un champ vibratoire d'énergie vitale qui se manifeste dans des champs énergétiques différents comme sami ou jinchi qui est une énergie raffinée, lumineuse source de pouvoir qui rend possible la santé et chiki ou hucha, l'énergie morbide, lourde, obscure qui se présente sous la forme de manque d'attention et donc de maladies.
Alberto taxo explique que la rupture de cette réciprocité cosmique engendre la perte de l'harmonie et le déséquilibre de la vie.
Le yachak converse avec les forces cosmiques  pour pouvoir agir (Ruray) et guérir.
La force (jinchi) est une énergie spirituelle (sami) qui s'exprime à travers quatre êtres différents et non quatré élements; le feu, l'eau, l'air et la terre; et se retrouvent  concentrés dans le Runa ou être humain, qui est une partie du cosmos.
Nous sommes un microcosme mais nous croyons être séparé.
L'Amour ou Munay est la force la plus puissante qui rends possible la spirale de la Vie.
Pour le yachak, être relié à l'énergie qu'est l'amour permet d'être en bonne santé, se déconnecter de cette vibration rends malade.
Soigner c'est faire en sorte que le corps et l'esprit vibrent avec celle de l'amour.
Tout dans le Monde est un sacrifice d'amour, les plantes possèdent un esprit, et c'est pourquoi on peut les respecter.
Les plantes soignent et nous donnent leur amour tout comme l'eau qui nous purifie nous nettoie et nous soigne.
L'énergie de l'amour habite dans le coeur (shunku).
Le yachay n'est pas la sagesse de l'intellect, qui est seulement humaine, le yachay est une sagesse qui se partage, elle est présente dans le monde entier.


Ushay est un pouvoir qui ne possède pas, qui ne peut pas être dominateur et violent.
C'est un pouvoir qui s'exerce, investie dans chaque partie et qui est en relation avec tous les êtres.
Ce n'est donc pas un pouvoir matériel, mais une force intérieure, énergétique.

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